Récit complet en 48 pages, écrit par Mathieu Missoffe et dessiné par Charlie Adlard. Parution en 2020 aux éditions Soleil.
Wendigo, where did you com from, where did you go ?
En 1917, la guerre des tranchées a décimé les armées française et allemande dans des conditions qui dépassent l’entendement, et qui ont fait franchir au concept de guerre un point de non-retour.
Depuis maintenant 3 ans, le Sergent Chereau, Lubin et Clovis vivent terrés dans leurs tranchées, dans un quotidien rythmé par les massacres inutiles et les assauts mal planifiés. Au milieu de tout ce chaos, le commandement constate de nombreuses disparitions dans les rangs. Des sentinelles ne reviennent pas de leur ronde, ce qui laisse penser que le régiment subit des désertions à répétition.
Toutefois, un beau matin, après que deux nouvelles sentinelles se soient volatilisées, les allemands d’en face hissent le drapeau blanc. Eux aussi subissent des pertes inexpliquées. Il ne s’agit donc pas de simples désertions, quelqu’un s’en prend aux soldats des deux camps sur le champ de bataille. Une trêve est donc décidée, pour que six soldats, français et allemands investiguent et capturent le ou les coupables. Un septième soldat, améridien mystérieux, est également dépêché. Chereau, Lubin, Clovis, doivent donc collaborer avec Wolfe, Lucius, et Berger, pour suivre la traque de Wohati, qui semble en savoir bien plus qu’il n’y paraît sur la menace qui plane dans les tranchées.
Charlie Adlard, ce n’est pas que The Walking Dead. Le dessinateur britannique a déjà fait des incursions dans le marché français avec Vampire State Building, et on a pu le lire plus récemment sur des titres indé comme Damn Them All.
Mathieu Missoffe est quant à lui un scénariste qui s’est fait un nom à la télévision, notamment en écrivant des téléfilms et séries télévisées. Cet album est sa seule publication en bande dessinée. Alors, que vaut ce Souffle du Wendigo ?
Tout d’abord, parlons du pitch, qui invoque la figure mythologique et horrifique du Wendigo. On trouve généralement cette créature sur son territoire originel canadien, il est donc rafraîchissant de le propulser dans un cadre inhabituel tel que la guerre des tranchées. Le scénariste parvient, malgré la brièveté du format, à développer le lore mythologique autour de cette légende sans briser le rythme.
Le Wendigo étant le plus souvent une allégorie de la voracité et de l’égoïsme, on est en droit d’attendre un renforcement thématique ou en tous cas, un parallèle avec les horreurs de la guerre. On peut dire que c’est le cas, mais de manière plutôt superficielle, étant donné que l’histoire s’éloigne rapidement des fameuses tranchées. On regrette en revanche que les personnages manquent d’épaisseur et de caractérisation, ce qui entrave la montée progressive en tension au fur et à mesure que le casting succombe à la sauvagerie de la créature.
L’un des enjeux principaux de l’album était aussi de voir collaborer des soldats français et allemands contre un ennemi commun, mais on constate avec regret que le trio allemand collé au basque de notre trio français ne bénéficie d’aucun temps fort, ni d’aucune mise en lumière qui aurait permis d’illustrer le thème, rendant leur présence presque superflue.
Le Souffle du Wendigo portait en lui les ingrédients d’une bonne série B d’action à la façon d’un Overlord, aidé par un casting fourni et engageant. Malheureusement, l’album paie son format trop court, ce qui entrave la mise en place d’éléments qui auraient contré ces défauts. On met tout de même 3 Calvin, grâce à la partie graphique assurée avec brio par Charlie Adlard.