
Histoire complète de 144 pages écrite par Ram V et dessinée par Arnand RK. Parution française assurée par HiComics dès le 16/01/2023.


Merci aux éditions Hicomics pour leur confiance.
La salsa du démon
L’an dernier, le scénariste Ram V nous avait bluffé avec Toutes les morts de Laila Starr. Cette fois, il s’associe avec Arnand RK, un artiste indien, pour explorer encore davantage la thématique de la mort et du deuil.

Erik Dieter est un prof de musique, qui a toujours tutoyé la grandeur sans jamais l’atteindre lui-même. Après des années passées à Manhattan loin de sa famille, Erik doit retourner dans sa ville natale pour assister aux funérailles de sa mère Alana, avec laquelle les rapports ont toujours été délétères. Une fois leur mère mise en terre, Erik et sa soeur doivent mettre ses affaires en ordre. Erik s’aventure dans le bureau de cette femme qu’il craignait étant enfant, celle-là même qui refusait qu’il exploite son potentiel pour la musique. Alors que la vielle femme ne s’était jamais montrée si sentimentale, voilà qu’Erik trouve une mystérieuse photo qui attire immédiatement son regard. Le cliché est celui d’un musicien dans la fleur de l’âge dont il ignore l’identité. Qui était cet homme ? Que représentait-il aux yeux d’Alana, au point de taire son existence et d’emporter son nom dans la tombe ?
Erik va se lancer dans une enquête retorse pour retrouver le nom de cet homme. Ses recherches vont lui faire renouer avec son talent mais aussi avec des secrets qu’il valait certainement mieux laisser enfouis.
A première vue, Ram V nous propose une nouvelle enquête d’un protagoniste sur ses origines, avec secrets de famille au menu et supplément quête de soi. Mais il faut bien l’admettre, Ram V sait y faire et va ajouter à cette sauce déjà-vue une âme et coloration particulières. En passant par le prisme de l’horreur et du surnaturel, le scénariste ne se contente pas d’explorer le deuil, il évoque aussi l’héritage et la transmission, à la manière d’Ari Aster dans Hérédité.

L’auteur nous parle aussi de ce que recherche chaque artiste dans sa discipline, des tourments qu’il peut s’infliger pour trouver l’accomplissement dans les arcanes de son art. La musique étant un art exigeant, l’idée d’un pacte faustien n’en est que plus symbolique, même si elle induit que l’inspiration et le génie ne peuvent être dus qu’à de cruelles muses.
Graphiquement, Arnand RK fait des merveilles, son trait renforce l’ambiance vertigineuse et morbide liée à la quête d’Erik Dieter. Ses planches rappellent, tant dans la composition que dans la peinture, celles de Bill Sienkiewicz. La lecture de l’album donne donc l’impression d’une partition hallucinée, une impro de jazz savamment ourdie par des forces obscures.
Blue in Green plaira indubitablement aux amateurs de musique, à ceux qui connaissent le prix de l’excellence, mais aussi aux lecteurs réguliers d’épouvante.



