Manga de Kaneko Atsushi
Delcourt (2023) – (2021), 275p./volume, 2/5 volumes parus, série en cours.
Merci aux éditions Delcourt pour leur confiance.
Dans un Japon alternatif trois adolescents se retrouvent dans un hôpital après avoir tenté de se suicider. Alors qu’ils sont contraints de suivre une thérapie dans cette prison médicale, ils réalisent qu’ils ont acquis d’étonnants pouvoirs supra-humains. Pourtant chacun sait que ce type de pouvoirs ne se transmet que par héritage génétique… Pendant qu’ils tentent de s’évader au risque de devenir des ennemis publics numéro 1, le duo de super-héros qui assure la sécurité de la ville (et accessoirement le pouvoir du maire) a le pressentiment que des forces maléfiques sont sur le point de se réveiller…
J’ai découvert le travail de Kaneko sur sa précédente trilogie, le dérangeant mais très réussi Search and Destroy. L’auteur avait déjà marqué les esprits avec Wet Moon ou Deathco, et jouit d’une assez rare moyenne de notation de 17/20 sur le site référence Manganews, en alternant les genres mais toujours avec un aspect nihiliste marqué et un style graphique aussi fort que classique. Sur sa nouvelle série, le voilà qui aborde le genre super-héroïque avec une influence toujours aussi marquée par la sous-culture underground américaine. Si son trait (où les trames sont quasiment absentes) s’inscrit dans les pas du maître Will Eisner ou d’un Craig Thompson, l’influence du récit serait plutôt à chercher du côté du Watchmen d’Alan Moore dont les couvertures s’inspirent.
S’ouvrant sur une scène choque et ultraviolente qui nous plonge d’emblée dans le monde sans filtre de Kaneko, la série (dont les deux premiers tomes sout publiés simultanément) évolue ensuite vers une classique histoire d’ado-parias qui sont soit rejetés par la société soit victimes d’agressions sordides. Ce qui crée l’intérêt c’est l’aspect absurde des pouvoirs assez pitoyables de ces trois-là et l’inversion des rôles entre un Gardien travaillant pour un pouvoir politique corrompu et de jeunes héros décidés à « tout cramer » (le manga de Kaneko sort à point nommé dans nos contrées…). Résolument punk, l’auteur maitrise toujours très bien le rythme de son récit qui alterne les contextes et les intrigues de façon variée sans que l’on sache trop comment il va boucler avec le démarrage tonitruant de sa série.
Après la révélation des pouvoirs et une tentative d’évasion les atermoiements de mal-être ralentissent un peu le rythme jusque là dynamique et offrent le sordide attendu sans encore véritablement rejoindre l’intrigue du héros Lightning Volt. On finit cette double lecture plutôt intéressé mais en attente d’une reprise de rythme pour assumer le code de l’anti-super héro.