***·BD·Nouveau !

Le Roy des Ribauds – Livre IV

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BD de Vincent Brugeas et Ronan Toulhoat
Akileos (2015-2017), série Le Roy des Ribauds, 4/5 volumes parus (cycle2).

Avec la profusion d’albums publiés par le duo Toulhoat/Brugeas on finit par ne plus trop savoir quelle série est finie ou en cours. Souvent échaudé par des retours pas au niveau de leurs attentes, ce couple artistique très qualitatif mais aussi exigeant envers son public semble avoir du mal à assumer des séries dont l’aspect original peut dissuader au-delà des curieux et ratent le statut de blockbuster. Le magnifique Republique du crâne sorti l’an dernier a reçu d’excellents avis critiques, tout comme le Roy et dans une moindre mesure Ira Dei. Pas assez pour permettre des séries au long cours vis à vis de l’éditeur Dargaud. Peut-être serait-il temps à ces deux auteurs de reconnaître que les BD historiques, fussent elles très bien écrites et dessinées ne sont pas forcément calibrées pour devenir des Best-sellers. On ne fait pas le Troisième Testament tous les jours. Une discussion avec les auteurs à Angoulême autour de la possibilité de conclure un jour Chaos Team m’avait surpris quand à une frustration remarquable, non en terme de ventes mais en terme de réception critique. Quand l’égo est touché la création est compliquée.

Le roy des Ribauds -4- Livre IVLe troisième volume du Roy m’avait un peu déçu en n’étant qu’un bon album concluant un premier cycle de haute volée. Je n’attendais pas de suite et ce quatrième qui ouvre un cycle un peu forcé et se conclura définitivement au cinquième volume. Alors que l’équilibre des forces était renouvelé de façon satisfaisante et logique au précédent tome, nous voici transporté dans une étrange enquête autour du meurtre rituel de jeunes femmes à Paris alors que le roi est occupé au siège de Chateau Gauillard en Normandie et que l’absence du Triste sire dans la capitale laisse son fils spirituel chargé de faire régner l’ordre dans les bas-fonds.

Bien que les dessins baissent d’un ton à l’économie et avec une passion qui semble moindre chez Ronan Toulhoat, la technique scénaristique est en revanche toujours là, parfaitement huilée, faisant décidément de Vincent Brugeas un des plus efficaces scribes de la BD franco-belge. Le soucis sur ce tome c’est justement la rupture d’équilibre qui élimine tous les personnages charismatiques qui faisaient beaucoup pour l’intérêt de la série, comme une sorte de « next-generation ». L’idée du renouvellement est honorable et aurait pu être intéressante mais on perd assez vite la hype et l’aspect démesuré qui fait le talent des auteurs. Si l’on comprend bien le drame qui se joue dans les solidarités « familiales », l’ensemble est trop passif jusqu’au sursaut final pour nous emporter comme précédemment. Ainsi l’on lit avec plaisir ces pages de rues médiévales poisseuses et ces dialogues qui font la part belle à l’héritage mais la tension dramatique arrive un peu tard pour vraiment passionner.

Encore une fois on ne pourra pas reprocher à Vincent Brugeas de s’être contenté d’une reproduction de la recette et espérons que si la machine a tardé à démarrer elle tourne à plein sur un tome de conclusion pour lequel les auteurs ont toutes les cartes pour proposer une magnifique apothéose.

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****·Comics·East & West·Nouveau !

Sentient

Roman graphique de 168 pages, écrit par Jeff Lemire et dessiné par Gabriel Hernandez Walta. Parution chez Panini Comics le 02/12/2020.

Nouvelle frontière, défis d’antan

Alors que l’Humanité glisse lentement vers le chaos et l’asphyxie sur Terre, ce qu’elle compte d’explorateurs et d’âmes volontaires est envoyé à travers les étoiles, afin d’établir une colonie qui sera le nouveau foyer de l’espèce humaine. L’équipage de l’U.S.S. Montgomery abrite un équipage de colons en route vers la colonie en cours de construction, avec parmi eux des enfants appelés à devenir les bâtisseurs de demain.

Seulement, aucun des moments de crise qu’à traversé l’Humanité ne s’est déroulé sans conflit. Entre la colonie et les gouvernements terrestres gronde un conflit larvé qui s’apprête à prendre une tournure bien plus funeste. Alors que le voyage interstellaire de l’U.S.S. Montgomery suit son cours, un sabotage commis par une séparatiste cause la mort de tous les membres adultes de l’équipage, n’épargnant les mineurs que de justesse. Les enfants livrés à eux-mêmes, c’est à Val, l’intelligence artificielle du vaisseau, qu’il revient d’en prendre soin afin de les faire arriver à destination.

Mère de substitution

Commence alors une éprouvante odyssée durant laquelle les enfants vont devoir faire face à des problèmes d’adultes, aidés et chapeautés par Val, dont la principale directive contenue dans son programme la poussera à veiller coûte que coûte sur son jeune équipage. L’on suivra plus particulièrement le parcours de Lil, impétueuse aînée du groupe, et d’Isaac, dont la mère est responsable du désastre.

Au fil des mois qui suivent, Val devient donc une figure parentale et tutélaire, apprenant aux enfants comment survivre sans les adultes et comment faire parvenir le vaisseau à bon port. Ainsi, pour survivre, Val et ses protégés devront se dépasser et aller au-delà de ce qui est attendu d’eux. Malheureusement, même parmi des millions de kilomètres de vide sidéral, peuvent se cacher des obstacles mortels, que même l’IA ne peut anticiper. Il reviendra alors aux petits explorateurs en herbe de s’adapter, et encore une fois, de faire preuve d’une sagesse tragiquement précoce.

Jeff Lemire, qui a déjà prouvé son talent grâce à des séries originales et bien pensées, nous emmène avec lui dans une odyssée spatiale paradoxalement intimiste. Reprenant le thème délicieusement SF de l’IA-parent (que l’on peut voir-subtilement-dans Alien avec Maman, l’ordinateur de bord du Nostromo, ou encore-pas si subtilement-dans le film I am Mother, ou la série Raised By Wolves), l’auteur de Sweet Tooth offre un scénario touchant sur la réalisation de soi et la nature de la conscience, loin des poncifs du genre voulant que l’IA soit mauvaise ou devienne hostile à l’humain.

Gabriel Hernandez Walta, dont on avait pu admirer le travail sur la série Vision, donne à voir encore une fois une très belle performance. Son coup de crayon est palpable, ce qui donne une matière certaine et non calibrée au dessin, notamment sur les plans rapprochés qui traduisent très bien les expressions des personnages (du moins, tant qu’ils sont vivants, bien sûr !)

Un très beau one-shot écrit par un scénariste très talentueux, cruel dans son exécution mais poétique dans son développement.

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Gung-Ho – Intégrale #1

BD de Benjamin Von Eckartsberg et Thomas Von Kummant
Paquet (2013-). série en cours, 4 albums parus et 1 intégrale.
La présente intégrale comprend les trois premiers volumes. Le billet est la mise à jour du billet paru sur la version album.

bsic journalismMerci aux éditions Paquet pour leur confiance.

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L’intégrale comprend les trois premiers volumes de la série en format compact (proche des comics), même maquette, pagination continue sur 248 p., couvertures de chaque tome intercalée et intérieur de couverture qui montre le plan du camp de base de la communauté. On aurait aimé quelques bonus mais à 35€ contre 51 pour l’équivalent en album cela vaut le coup, surtout que contrairement à certains éditeurs Paquet annonce la couleur et permet un très large choix (album classique, grand format, intégrale) ce que je trouve extrêmement appréciable. J’apporterais juste un bémole sur le HS d’une trentaine de pages qui aurait parfaitement pu intégrer cette intégrale pour en faire un volume vraiment intéressant hormis le prix et la facilité à le ranger dans la bibliothèque. A noter que la série en est actuellement au tome 4, ce qui laisse entendre soit que la série se cloturera au sixième, soit que l’éditeur prévoit d’intégrer ce HS dans la seconde intégrale…wait and see!

Dans un futur proche, ce qu’il reste de l’humanité s’est réfugié dans des villes fortifiées et des colonies qui tentent de recoloniser le territoire en se protégeant du fléau blanc, les Rippers. Lorsque arrivent dans la communauté très réglementée de Fort Apache deux orphelins, Archer et Zack, ils se retrouvent confrontés à l’acceptation de ces règles, à leur transgression par leurs pulsions d’adolescents et au défi de se construire dans ce monde hostile.

gung_ho_page02_blogGung-Ho est une BD post-apocalyptique dans la veine de Walking Dead… sauf qu’ici pas de zombies. Le contexte préalable n’est que faiblement évoqué et si l’on apprend tardivement ce que sont les Rippers, l’on ne sait même pas s’ils sont à l’origine de la réduction de la population. Ce qui intéresse les deux auteurs ce sont les relations entre les personnages et notamment entre groupe des adolescents et des adultes. Cette mini société est absolument passionnante par ce qu’elle transpose en concentré les impératifs de toute société entre justice, liberté et ordre. Derrière ces concepts, les adultes et les adolescents n’ont pas les mêmes visions et vont souvent tester la réactivité de cette société expérimentale et communautaire. Les personnages 9641ee1d5a597fd6db0382413ba5e9f8-gung-ho-manga-comicssont vraiment nombreux et caractérisés à la fois graphiquement et par le scénario. Hormis quelques exceptions (le méchant corrompu), tous sont subtiles et crédibles, le lecteur comprenant leurs motivations qui ne sont jamais simples à condamner. Cela car le travail de contexte est important et la pagination permet de prendre le temps de soigner chaque figure. L’élément déclencheur de l’intrigue est l’arrivée des deux jeunes frères et notamment d’Archer, le joli rocker tête-brûlée (en préambule à chaque album les auteurs nous rappellent que Gung-Ho signifie « tête brulée »), qui ne respecte aucun code et va par ce fait mettre l’équilibre de la communauté et de ses lois en danger. Certaines personnalités sont plus alléchantes, comme la jeune asiatique experte en maniement du sabre ou le chef militaire du groupe. Mais tous semblent vivre leur vie entre les cases.

Ce qui a marché dans Walking dead (la transposition de la société dans une situation de crise extrême) fonctionne aussi ici avec l’accent mis sur l’adolescence et les thèmes qui lui sont liés (la transgression, la musique, le flirt, l’alcool, le passage au stade adulte,…). En revanche, si la série de Robert Kirkman est dotée de dessins loin d’être virtuoses, ici Thomas Van Kummant (passé par le design et l’infographie) fait des miracles avec sa palette graphique. maxresdefaultSi vous êtes allergiques au dessin numérique vous pouvez passer votre chemin… pourtant vous aurez tort! Comme Miki Montllo sur la formidable série Warship Jolly Rogers (leur technique est proche, entre des formes plates et des textures et contrastes très sophistiqués) il parvient à donner une grande expressivité aux visages et une harmonie improbable quand on regarde les dessins à la loupe. Élément par élément on peut même trouver cela moche, mais l’ensemble est très léché, entre le photoréalisme des arrière-plans et les éclats de couleur des personnages. Comme Bastien Vivès, Van Kummant parvient à donner un réalisme à ses dessins en faisant appel à notre mémoire visuelle, transformant quelques traits ou touches de peinture en une anatomie et mouvement très parlant. Mais surtout les auteurs nous donnent un vrai plaisir à suivre tous ces personnages, pas seulement les héros. L’esprit est celui d’une bonne série TV que l’on veut voir durer des années. Ainsi sur un canevas simple ils parviennent à nous attraper, nous faire craindre pour untel, souhaiter un avenir à un autre, etc.

ckizmgtwsaa2j5oGung-Ho est une vraie réussite et une très bonne surprise sur tous les plans, tant graphique que thématique. Deux auteurs inconnus arrivent à confirmer l’essai d’un projet montrant que l’on peut raconter mille fois la même histoire en intéressant toujours différemment. Par l’intelligence et la spécificité de chaque auteur tout simplement.

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Seven to Eternity #2

East and west

Comic de Rick Remender et Jerome Opena
Urban (2018), Ed US Image comics (2016), 2 vol parus

seven-to-eternity-tome-2Je vais aller droit au but sur les deux points négatifs de cet album: l’intervention d’un nouvel illustrateur sur les deux chapitres centraux de l’album (de qualité très moyenne) et la maigreur des bonus proposés au regard des superbes couvertures originales (qu’Urban a choisi de détourer alors que la version US était mise en page au format affiche de cinéma) et des interviews et croquis du t1. Les couvertures alternatives en fin d’album ne compensent pas vraiment ce manque.

Ceci étant dit, parlons de l’album et de la suite du périple des Mosak après leur enlèvement du Roi Fange (la critique du premier tome est ici). Comme je l’avais expliqué, l’univers est touffu, le nombre de concepts très important, mais puisqu’on est dans le second volume ce contexte nous est désormais un peu plus familier. Nous reprenons le voyage alors que des morts ont eu lieu dans la communauté et qu’Adam Osidis est suspecté de vouloir se soumettre au Maître des murmures pour sauver sa vie (il est très malade). Très vite ils sont attaqués et seront contraints de se séparer et c’est bien l’objet de ce volume pour le scénariste (qui semble construire son intrigue un peu comme dans LOW, avec séparation en plusieurs récits parallèles): les trahisons ou suspicions de trahisons au sein de cette « famille » comme Gobelin aimerait la voir.

Résultat de recherche d'images pour "seven to eternity trahison"Le design général est toujours aussi puissant et si le scénario prends plus de temps et propose moins de pages démentielles que l’introduction, la relation avec Garils, le maître des murmures, est centrale et absolument fascinante. Ce colosse sème le doute avec une telle subtilité que le lecteur n’a absolument aucun moyen de savoir s’il est sincère ou manipule les autres. Sans doute un peu des deux et c’est ce qui en fait un méchant incroyable. Avec Seven to eternity Remender est en train d’inventer un nouveau concept: l’anti-méchant, pendant du anti-héros et auquel on tendrait à s’attacher!

Nouveau concept de ce volume, le marais, sorte de monde parallèle omniprésent qui peut corrompre l’âme de ceux qui s’y sont physiquement noyés. Via ce « personnage » les auteurs développent le background sans non plus en dévoiler beaucoup. La lecture reste exigeante et demande de la concentration tant on ne nous fais pas beaucoup de cadeaux explicatifs. Mais les réponses viennent plus loin.

Résultat de recherche d'images pour "seven to eternity harren"Par certains éléments on revient vers une fantasy plus classique (le village des elfes ailés, proches de la nature) et des thèmes récurrents chez Remender (l’écologie), qui font un peu perdre de l’originalité. Ces passages correspondent aux deux sections centrales dessinées par James Harren et c’est là que le bas blesse. Malheureusement situées en plein cœur du récit, qui plus est avec plusieurs scènes d’action importantes, ce graphisme vraiment pas terrible brise la lecture à la fois thématiquement et quand à l’immersion dans cet univers fantastique. La section finale dessinée par Opena et mettant en face Osidis et ses choix est très puissante et permet de revenir dans l’histoire mais cette rupture de milieu d’album est dommageable sur le plaisir global. J’espère vraiment que cette incursion n’est que passagère et que Opena réalisera l’entièreté du prochain album (à paraître cet été aux Etats-Unis). Du coup je retire un « calvin » à la note du premier tome, sur une série qui reste néanmoins majeure.

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***·BD·East & West·Service Presse

Cuisine chinoise

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BD de Zao Dao
Mosquito (2018), 86p.

bsic journalismMerci aux éditions Mosquito pour cette découverte.

couv_319961La première publication de Zao Dao chez Mosquito faisait saliver par sa puissance évocatrice fantastique, instillant une irrépressible envie d’avoir enfin une vraie grande histoire de démons et de chasseurs dans la Chine mythologique et il faut dire que cette Cuisine chinoise ne viens pas combler ce manque (peut-être le art-book « carnet sauvages » remplit-il cet effet… malheureusement je ne l’ai pas lu). C’est sans doute son principal défaut, car l’on sent dans chaque image la permanence de cet univers un peu cracra fait de personnages mi-hommes mi-démons, d’insectes et de fantômes aux physionomies toutes plus étranges. https://www.bedetheque.com/media/Planches/PlancheA_319961.jpgCertaines histoires sont un peu ésotériques notamment quand à leur chute et je pense qu’il est préférable (comme pour certains Miyazaki du reste) de prendre cette lecture plus comme des tranches d’univers culturel chinois que des récits construits. Il est probable que les codes des légendes chinoises soient assez éloignés des nôtres mais le travail graphique reste remarquable, notamment par les changements de techniques et de matériaux. L’utilisation du papier jaune notamment permet de fantastiques compositions, avec le personnage aux cheveux blancs qui revient souvent dans l’œuvre de l’artiste.

Des cinq histoires racontées dans le recueil, deux m’ont parues de longueur et de construction permettant un véritable récit. Les autres sont plus des expérimentations (la deuxième séquence sur les insectes est peut-être la plus intéressante mais aussi la plus expérimentale, intime et éloignée du thème de la cuisine: un jeune homme assouvit sa rancœur de voir ses parents se battre en massacrant des insectes, permettant un beau travail graphique, mais oh que sombre!).

Résultat de recherche d'images pour "mosquito cuisine chinoise zao dao"Hai Zi nous fait suivre un humain-démon passionné de cuisine et incompris et rejeté par les humains car il utilise des ingrédients dégoûtants pour ses créations. Son grand-père souhaite qu’il redevienne plus classique afin de pouvoir subvenir aux besoins de la famille grâce à leur restaurant… quand surviennent deux créatures aux goûts peu académiques.

Haleine d’immortelle est l’histoire la plus drôle qui est la plus proche d’un documentaire sur la cuisine en expliquant l’histoire d’un gâteau soufflé en pâte de riz et qui renfermerait l’haleine fétide d’une mamie…

Au final si Zao Dao reste un auteur majeur proposant régulièrement des fulgurances et des expérimentations passionnantes, sa maîtrise des récits reste à développer et pour l’heure, personnellement je me reconnais mieux dans ses récits de fantômes même s’ils sont sous forme de simples illustrations. Son travail sur la cuisine lui aura sans doute permis d’apprendre certaines structures narratives et espérons qu’elle nous proposera prochainement enfin la grande histoire évoquée dans le souffle du vent dans les pins

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Le blog très personnel et assez fourni de l’auteur.

***·BD·Documentaire·Rétro

Droit d’asile

Le Docu du Week-End


Droit d’asile
BD d’Etienne Gendrin
Des ronds dans l’eau (2011), 96p.

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Etienne Gendrin nous propose pour sa première BD publiée, un reportage sous la forme d’entretiens qu’il a pu mener au sein d’un foyer de mineurs étrangers, avec une galerie d’exilés en attente de droit d’asile.

Dès mon second billet pour cette rubrique je fait une entorse sur le côté graphique: il faut reconnaître que nous avons là un premier album d’un auteur amateur… avec un niveau graphique pas terrible. Mais je le dis souvent ici, on adapte ses exigences à l’auteur. J’avais été assez dur avec le Roy des Ribauds 3 de Toulhoat (auteur que j’adore par ailleurs) et surtout avec Pontarolo sur les Déchaînés, par-ce qu’il s’agissait d’auteurs professionnels. A l’inverse, le niveau technique de Gaël Henry sur Jacques Damour ne m’avait pas posé de problème par-ce que l’auteur sait compenser par une maîtrise du cadrage, des expressions et des situations. Bref, Gendrin propose ici un reportage qui vaut surtout pour ce qu’il nous apprend, pour le projet en lui-même que pas le graphisme qui finalement nous apporte peu.

Résultat de recherche d'images pour "droit d'asile gendrin"L’album est donc structuré en plusieurs parties centrées sur le récit d’un migrant. Ils viennent d’Afrique, du Caucase ou d’ailleurs mais ont en commun leur dynamisme (ils ont parcouru seuls des centaines, voir des milliers de kilomètres par-ce qu’ils voulaient s’en sortir) et leurs traumatismes. Ici a priori rien d’inventé (j’y reviens). Parfois l’auteur ne parvient pas à faire parler le jeune et se fie à un tiers (le directeur du centre, un autre migrant,…). Mais ces récits sont touchants par-ce qu’ils nous mettent devant les yeux la vraie vie souvent incroyable de personnes banales dans un foyer banal. L’un a vu son père tueur à gage officier devant lui, un autre a été enrôlé de force dans une guerre civile,… Ces traumatismes sont relatés de façon froide, au travers du graphisme, sans aucun jugement ni commentaire. Les seuls analyses viennent des personnels du centre (le directeur donc, mais aussi deux professeurs de français). Ce sont eux qui donnent le recul à ces récits en nous apprenant plein de choses sur un sujet peu traité par les média par-ce que très règlementé (et donc peu sujets à débat ou à passions…). Par exemple que les mineurs arrivant sur le territoire sont obligatoirement logés, nourris et éduqués par la Nation, jusqu’à leurs 18 ans. Alors ils deviennent soit sans-papier soit reçoivent leur statut de réfugié. Ainsi le personnage s’interroge sur l’intérêt pour un pays de renvoyer dans leur pays des gens pour qui il a été dépensé de grosses sommes pendant des années, qui parlent le français, ont des compétences… On apprend également la situation du Cabinda, enclave de l’Angola en situation de guerre civile et dont aucun média ne parle… Les professeurs nous rappellent que ces jeunes, qui cohabitent avec des jeunes français placés dans le foyer (pour d’autres motifs donc, qui ne seront pas abordés dans l’album), tirent tout le groupe vers le haut, par leur envie de s’en sortir, par leurs efforts constants, exemples que devraient suivre certains pensionnaires au vécu parfois moins compliqué.

Résultat de recherche d'images pour "droit d'asile gendrin"A un moment Gendrin dit au détour d’une phrase qu’il a changé le décors de l’entretien pour ne pas froisser le témoin… ce qui mine de rien nous rappelle que dans un documentaire seule la franchise de l’auteur nous permet de nous convaincre que tout est vrai! Un réalisme fragile donc. Certains petits détails graphiques se penchent sur l’auteur de BD doutant, parlant un peu de lui et de son travail ou sur les habitudes des pensionnaires du centre. Cela donne du corps à l’album et c’est à ce moment que malheureusement la qualité graphique affaiblit un peu le propos.

Droit d’Asile, monté comme un formidable guide pédagogique (que tout CDI et bibliothèque devrait avoir), n’en reste pas moine un très bon petit livre et l’auteur l’a pas à rougir de ses faiblesses tant la lecture est agréable et surtout très instructive. Etienne Gendrin a depuis publié un album brossant le portrait de sa grand-mère  aux éditions Casterman.

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****·Comics·East & West·Nouveau !·Numérique·Service Presse

Wild Blue Yonder

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Comic de Mike Raicht, Austin Harrison et Zach Howard
Glénat comics (2017) – publi US par IDW publishings (2016), 192 p.

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On commence une semaine « aviation » avec une découverte comics indépendant dénichée par Glénat, avant une chronique mercredi en BD de la semaine sur la série en cours du dessinateur-aviateur Romain Hugault. Je découvre le travail de Glénat sur les comics hors sentiers battus et suis ravi de voir qu’il n’y a pas qu’Urban pour proposer des albums américains innovants.

Je suis vraiment très content d’avoir lu et apprécié ce one-shot! Je l’ai déjà exprimé sur ce blog, les comics c’est compliqué… J’y trouve beaucoup de médiocrité graphique et une routine industrielle autour des deux franchises de super-héros Marvel et DC qui outre d’exclure le public qui ne souhaite pas passer sa vie à ne lire que ça, tourne un peu en circuit fermé. En même temps, d’incroyables illustrateurs, une culture du design graphique, des couvertures et de la mise en scène puissantes, appuyées sur des personnages très forts pour l’imaginaire. En somme, je flirte souvent avec les comics, mais toujours un peu de loin et en privilégiant les séries courtes et les duos d’auteurs (je suis allergique aux équipes graphiques hétérogènes). Du coup je suis quelques auteurs en particulier (en ce moment Esad Ribic, sorte de Midas du crayon, ou Sean Murphy…) et essentiellement de l’Urban qui édite des BD hors Marvel/DC. Wild Blue Yonder est édité aux USA par un éditeur visiblement spécialisé dans les adaptations BD de séries télé et en partenariat étroit avec Glénat.Résultat de recherche d'images pour "wild blue yonder howard"

Dans le futur l’écosystème a été quasiment détruit par la pollution radioactive. Ce qu’il reste des hommes s’est réfugié sur les hauteurs et dans des navires volants. L’Aurore est un mythe, vaisseau fonctionnant au solaire dans un monde dépendant du pétrole  et pourchassé par la flotte du terrible Juge. A son bord, un équipage idéaliste, fonctionnant comme une famille, incarnant un monde où la solidarité remplacerait la survie de tous contre tous… 

Résultat de recherche d'images pour "wild blue yonder howard"Le première surprise de ce très bon comic vient des dessins. Zach Howard a commencé à publier dans les années 2000 et n’a pas une biblio très fournie, hormis The cape sorti en France et doté d’une bonne réputation. Son style me fait penser à un mélange de Vatine et de Travis Charest (excusez du peu!). Avec sa propre originalité (notamment une étonnante utilisation des trames pour ombrer ses dessins, un peu comme dans les Manga), il propose un dessin très encré, parfois sales, au découpage serré et toujours très propre techniquement. J’adore! Son design des engins est de style post-apocalyptique type Mad-Max. Image associéeOn a vu plus inspiré concernant les engins, mais l’atmosphère générale de la BD est réussie et décrit un univers classique du genre, crasseux, à la fois technologique et bricolo. Les films de George Miller sont clairement la première inspiration de cet ouvrage qui met en opposition un groupe idéaliste (incarné par le formidable personnage de Cola, super-pilote éternelle optimiste dont la foi en l’homme est indestructible) et un autre, militarisé, hyper-hierarchisé derrière le Juge, chef nihiliste qui tente de réunir une élite devant recréer l’humanité avant l’élimination du reste de l’humanité… J’ai aimé outre la maîtrise graphique et la vraie personnalité de ce dessinateur, une cohérence et une implication dans un projet personnel, non issu d’une grosse machinerie.

Comme tous les post-apo la différence joue à peu de choses et ici à un relationnel original entre les personnages: le cœur de l’équipage de l’Aurore repose sur une famille (la mère commandante, le père ancien pilote et la fille, héroïne de l’histoire) confrontée aux nécessités militaires de la survie face aux attaques du Juge. Peut-on être mère quand tout un équipage compte sur vous? La fille pilote peut-elle vivre avec une mère qui refuse de se comporter comme telle? Peut-on encore avoir confiance en un étranger et croire en l’amour dans ce monde sans espoir? Wild Blue Yonder est un peu la BD que Vatine aurait dû faire depuis longtemps (au vu de ses nombreuses illustrations de ce style) et donc une surprise inespérée.

Résultat de recherche d'images pour "wild blue yonder howard"Les séquences d’action aériennes sont nombreuses et très bien menées, assez crasseuses et souvent barbares avec le génial personnage de Scram, sorte de furie indestructible équipée d’un Jetpack, sautant d’avion en navire volant, échappant aux balles et emmenant les têtes de ses adversaires avec sa hache… Le format one-shot en quelques 200 pages ne permet malheureusement pas de développer beaucoup plus les personnages, l’univers ou de prendre plus de temps dans les séquences aériennes. Mais les auteurs proposent néanmoins un remarquable équilibre entre les scènes de dialogues, les intérieurs métalliques des navires et les plans larges aériens. Avec comme petite cerise qui semble anodine mais apporte une touche d’humanité, un cœur à cet album: le chien aviateur (que le dessinateur explique être inspiré de son propre chien disparu). Un toutou craquant qui fait de ce comic indépendant une œuvre  efficace et touchante, une belle respiration dans la BD américaine.

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***·BD·La trouvaille du vendredi·Rétro

La Trouvaille du vendredi #8

La trouvaille+joaquim

 Monsieur Mardi-gras Descendres

BD d’Eric Liberge,
Dupuis – coll. Empreintes (1998-2005), env. 70p./ album, 4 volumes parus (+ 1 prologue numéroté « tome 0 »), série finie.

monsieurmardigrasdescendres1c_27052004La série d’Eric Liberge est une singularité dans la BD franco-belge. D’abord par son sujet graphique: au fil de 4 albums, soit près de 300 pages, il va nous décrire un univers peuplé uniquement de squelettes, sur une lune cendrée à la lumière blafarde… Sacrée gageure que de distinguer les personnages d’une histoire, leurs expressions, sur des squelettes a priori tous identiques! L’histoire est celle de Victor Tourterelle, alias Mardi-Gras Descendres sous son nouveau nom issu du calendrier des postes et attribué à tout nouvel arrivant de l’autre côté de la vie…

Lorsqu’il arrive le personnage principal est embauché par une secte occulte, la Corniche, pour cartographier un monde qui ne l’a jamais été, grâce au gigantesque télescope de Charon. Le savoir doit permettre de combattre l’obscurantisme de l’administration et ses inquisiteurs de la Salamandre qui régit ce monde. Résultat de recherche d'images pour "monsieur mardi-gras descendres liberge"Dans une BD à l’humour absurde, la principale richesse de ce monde est le café, breuvage qui produit des sensations issues de la vie passée et donc très dangereux pour le système en place en ce qu’il sort les âmes de leur sidération. Les carcasses des morts étant désormais immortelles, l’on peut voir l’ancienneté de chaque être pas le nombre de réparations rivetée que porte son corps. Cela permet au niveau du dessin d’incroyables personnages au design steampunk jamais vu. Le scénario prend la forme d’une conspiration avec une résistance à la dictature du Pays des Larmes. Le personnage principal va entamer un voyage initiatique pendant que les règles qui régissent ce monde (absurdité sans but ou loi divine?) sont battues en brèche par la contestation qu’il a  apporté. Finalement assez politique comme sujet, si l’on fait un parallèle avec tout régime dont la population ne questionne jamais la pertinence…

Résultat de recherche d'images pour "monsieur mardi-gras pays des larmes liberge"L’œuvre (comme fort bien expliqué dans la post-face présente dans le quatrième volume)  a été un long chemin: du fanzine à la collection Empreintes de Dupuis et la reconnaissance par un Prix Goscinny (récompensant un jeune auteur) à Angoulême en 1999, la publication des quatre volumes s’étalant sur 6 ans. Cette BD très personnelle suit donc les pérégrination d’un rebelle arrivé dans un pays de squelettes extrêmement organisé sur le modèle d’une administration totalitaire et où la quête de sens semble avoir échappé à toutes les âmes défuntes. Sur un ton plutôt drôle, rythmé et caractérisé par des dialogues tantôt ampoulés de formules théâtrales, tantôt amoncellement de termes argotiques ( pas loin du dictionnaire du capitaine haddock…), le sujet de fonds est bien celui du sens de la vie et des introspections inévitables pour une âme tombée au purgatoire… Sujet hautement philosophique donc, porté par un graphisme aux visions fantasmagoriques empruntant à l’univers des graveurs romantiques (Gustave Doré n’est jamais loin).

Résultat de recherche d'images pour "monsieur mardi-gras pays des larmes liberge"Ce qui est remarquable dans cette série, outre son originalité totale portée par un graphisme à la fois très distingué, pointu techniquement et parfaitement adapté au « lieu » (des mélanges de gris et monochromes, d’ombre-lumières spatiales et d’architectures labyrinthiques à la fois cyclopéennes et aux perspectives vertigineuses) c’est que dans une profusion de textes, d’images et, il faut le reconnaître, quelques pertes de lecteur en cours de route, l’auteur semble avoir toujours su où il allait malgré la complexité des sujets. Le dialogues très nombreux sont très bien faits même s’ils tournent souvent en rond, un certain nombre d’envolées lyriques étant assez dures à suivre… mais je pense qu’elles n’ont d’autres objet que leur esthétisme, appuyé par un travail sur les typographies, élégantes et variées, permettant d’appuyer graphiquement le texte.

Image associéeDe plus chaque album a son unité. Graphiquement d’abord, si Liberge commence par du quasi noir et blanc (la maîtrise du trait est dès le début de très haut niveau, notamment dans la maîtrise anatomique des squelettes qu’il soumet à des aventures pourtant tout à fait épiques!), dès le tome 2 les couleurs subtiles de gris et de sépia s’articulent avec des décors monumentaux, tantôt steampunk, tantôt inspirés de l’art gothique ou carrément Bauhaus. Par moment on pense aux cités obscures de Peeters et Schuiten. Le troisième volume est pour moi le plus abouti graphiquement, avec de pleines pages où le navire du héros surplombe les majestueux décors de Pluton et les visions de son passé. Dans le dernier volume, je regrette l’apparition de trames qui abîment à mon sens les magnifiques planches.

Résultat de recherche d'images pour "monsieur mardi-gras liberge resurrection"Le voyage va emprunter aux cercles de l’Enfer de Dante autant qu’à l’univers de l’Alchimie et des réincarnations karmiques. Je n’en dis pas trop pour ne pas en révéler, la découverte de cet univers étant une partie de l’intérêt de cette série. Difficile de décrire une série unique tant la profusion de sujets et d’objets graphiques nécessite l’expérience de la lecture pour en comprendre la singularité. Cette œuvre d’auteur a le grand  mérite de ne pas être prise de tête malgré son ambition et un certain intellectualisme. C’est une véritable aventure visuelle à nulle autre pareil qu’il faut avoir lu dans sa vie d’amateur de BD.

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**·BD·Manga·Rapidos

City Hall #6

Manga de Guillaume Lapeyre et Rémi Guérin
Ankama (2012-2015) 7 volumes (série finie).

Couverture de City Hall -6- Tome 6

Un billet sur le premier cycle (tomes 1-3) a été publié sur le blog, ainsi qu’un rapidos sur les tomes 4 et une BD de la semaine pour l’excellent tome 5.

La quête se poursuit alors que Jules Verne a rencontré Nikola Tesla, seul capable d’activer la porte vers le Monde à l’envers. Le volume se structure sur le conflit (historique) entre Tesla et Edison et voit l’intervention de HP Lovecraft, maîtrisant le voyage entre les dimensions et envoyé par le président des États-Unis Abraham Lincoln. Des conflits cachés entre les personnages apparaissent et la fine équipe va bientôt embarquer sur le plus réputé des submersibles, pour l’ultime voyage.

Clairement ce volume n’est pas le meilleur. La faute aux nombreux sauts temporels qui cassent un récit déjà souvent verbeux. Le design général est un ton en dessous, moins de personnages interviennent et les découvertes sont moins nombreuses que d’habitude. On a le sentiment que les auteurs ne se sont pas lâchés, dans un entre deux avec un tome 5 vraiment excellent et un final pour lequel ils se sont peut-être préservés…

 

****·BD·Manga·Mercredi BD

City Hall #5

Manga de Guillaume Lapeyre et Rémi Guérin
Ankama (2012-2015) 7 volumes (série finie).

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Un billet sur le premier cycle (tomes 1-3) a été publié sur le blog, ainsi qu’un rapidos sur le tome 4 pour comprendre le concept de la série.

Je fais une petite entorse en publiant un manga (normalement réservé au lundi) et un volume de série en cours. Ceci car ce volume 5 est vraiment une très grosse surprise et atteint  une qualité digne d’un album one-shot justifiant une BD de la semaine…

Dans cette série Steampunk de style Manga, entre humour et action et caractérisée par un rythme effréné (qui peut parfois épuiser le lecteur!), Jules Verne accompagné d’Arthur Conan Doyle et d’une agent spéciale envoyée en Europe par par Eliott Ness se retrouvent à Paris à la recherche du texte descriptif du méchant Black Fowl afin de sauver son père. Le tome commence directement dans le Monde à l’Envers, de l’autre côté du Miroir (le monde d’Alice au pays des Merveilles) où le Chat de Cheshire soumet Houdini (envoyé là par son double maléfique) à des énigmes redoutables. L’histoire progresse ainsi en parallèle entre les mésaventures de Houdini qui rencontrera le créateur de ce monde parallèle, Lewis Caroll, et les héros qui sont eux recueillis par un Victor Hugo membre d’une  résistance occulte comprenant rien de moins que Maupassant, Agatha Cristie, Edgar Poe, Tolkien et Maurice Leblanc (Arsène Lupin)… ouf!

Résultat de recherche d'images pour "city hall 5 lapeyre"Vous l’aurez compris, la grande force de cette série est l’extraordinaire imagination et le patchwork cohérent qu’ont réussi à créer les auteurs autour de ce monde où le papier permet de générer une réalité par sa simple description. Sortes de sorciers dotés de crayons à la place de baguettes, les personnages sont tous des figures de l’histoire littéraire  (mais également Lincoln, Graham Bell, Malcolm X,…). Le concept est extrêmement audacieux et excitant et si les premiers volumes souffraient de quelques défauts de jeunesse, les auteurs atteignent ici pleine maturité de leur récit. On reste dans du manga ce qui implique une relation entre les personnages un peu manichéenne, des dialogues un peu ado et des découpages où le rythme est la vertu cardinale. Mais l’ensemble reste assez lisible et surtout le design général est vraiment alléchant. L’ambiance steampunk laisse le champ libre à toutes les possibilités scénaristiques concernant des innovations technologiques à vapeur (les auteurs s’inspirent des découvertes récentes… à la sauce Révolution industrielle). Les grande auteurs, tous dotés d’une créature imaginaire issue de leurs crayons sont dessinés de façon totalement libre et fantasmée, comme des héros de jeux-vidéo. Les conspirations, agences secrètes et histoire occulte foisonnent dans cet univers, si bien que malgré la grosse pagination, on trouverait presque que tout va trop vite et l’on souhaiterait que la série continue (elle s’achève au septième tome). Ce volume comporte plus de découvertes que d’action mais reste sur un très bon équilibre entre les dialogues too-much de Jules Verne, l’univers fantasmagorique de l’autre côté du miroir (même la Reine de cœur apparaît!) et la confrérie occulte de Victor Hugo.

Image associéeC’est plein, ça déborde de cœur et d’envie de la part des auteurs (comme cette double illustration en transparence!) qui ont voulu mettre tout leur amour des imaginaires dans leur création et je vous invite vraiment à découvrir ce très bon manga français (surtout si vous n’êtes pas férus de manga) qui fait de la littérature classique un monde d’action, d’énigmes et d’aventure!

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Cet article fait partie de la sélection de22528386_10214366222135333_4986145698353215442_n, cette semaine hébergée chez Mille et une frasque.