***·Comics·East & West·Nouveau !·Service Presse

Jurassic League

Récit complet en 144 pages, écrit par Daniel Warren Johnson et dessiné par Juan Gedeon. Parution en France chez Urban Comics le 05/05/2023.

Paléo-Héros

Bien avant que l’Homme ne devienne l’espèce dominante sur Terre, la survie n’était conditionnée que par une seule règle, un mantra universel qu’aucune créature foulant le sol ne pouvait ignorer: manger ou être mangé. C’est un principe qui a guidé les dinosaures durant les millions d’années que dura leur règne. Alors que les primates sont finalement devenus des hommes, cette version de la Terre n’a pas fait disparaitre totalement les reptiles géants, bien au contraire: elle a permis à certains d’entre eux d’évoluer, pour adopter une forme bipède humanoïde.

Ainsi, un jeune Allosaure humanoïde voit un jour ses parents dévorés dans une allée sombre-excusez-moi, dans une sombre clairière de Gotham City, et décide de combattre la cruauté en devenant Bat-Dino. Sur son île, une jeune Tricératops décide d’endosser le costume de Wonderdon afin de défendre la paix, tandis que Supersaure défend les humains qui l’ont adopté. Ce trio va se réunir afin de défendre la planète de Darkyloseid, seigneur reptilien qui a déjà écrasé de nombreux mondes sous son talon.

Connu pour sa revisite de Wonder-Woman, Daniel Warren Johnson s’empare d’un pitch encore plus délirant avec ce Jurassic League. Vous l’aurez compris, chaque membre de la célèbre Ligue de Justice subit une transformation reptilienne en adéquation avec son caractère. Superman devient Supersaure, reflétant ainsi le pacifisme et la force tranquille des sauropodes. Le choix du Tricératops pour Wonder Woman est également bien réfléchi, ces derniers étant herbivores et donc plutôt pacifiques, mais capables d’en remontrer aux plus féroces prédateurs. Faire de Batman un allosaure peut sembler surprenant au premier abord, mais il faut savoir que ces derniers étaient parmi les plus agiles des théropodes et plutôt effrayant, ce qui sied plutôt bien à notre chauve-souris favorite. On peut également trouver une symbolique assez cohérente dans la transformation de Flash en vélociraptor, ou d’Aquaman en Baryonyx, un dinosaure amphibie.

En revanche, il ne faut pas chercher dans cette Jurassic League un semblant de vérité scientifique, étant donné que le récit fait cohabiter Dinosaures et Homo Sapiens. On peut néanmoins compter sur la patte toute particulière de Danniel Warren Johnson pour insuffler une coolitude absolue à un pitch qui aurait très facilement tomber dans le ridicule. Sans pour autant tourner son concept en dérision, l’auteur (secondé par le dessinateur au scénario), nous entraine dans une aventure courte et sans temps mort, emplie de diverses références.

Étant donné le contexte, le récit ne prend par contre pas la peine de faire dans la subtilité vis à vis de l’antagoniste, dont le portrait est rapidement brossé, avec manichéisme comme il est coutume dans ce type d’histoire.

Si Jurassic League se démarque, c’est aussi et surtout par sa qualité graphique. Juan Gedeon fait des débuts fracassants en livrant une performance brute et sans concession, très fun dans ses designs ainsi que dans le découpage des planches.On peut dire qu’on retrouve dans son dessin le même enthousiasme que dans ceux de Johnson, qui intervient quant à lui sur les couvertures. Malgré une fin un peu rapide, l’album se lit avec plaisir de bout en bout, et pourra être apprécié même si vous ne connaissez que vaguement la Justice League et que vous avez oublié votre encyclopédie des dinosaures.

****·Comics·East & West·Nouveau !·Service Presse

DC vs Vampires #1: Invasion

Mini-série en trois volumes, écrite par James Tynion IV et Matthew Rosenberg, dessinée par Otto Schmidt.

Merci aux éditions Urban pour leur confiance.

Mordez-les tous

Nous avions eu les zombies chez Marvel, puis les zombies chez DC, il y a maintenant les vampires chez DC, parce qu’après tout, pourquoi pas ?

Tout commence lorsque un étranger se présente aux portes du Hall de Justice. Accueilli par Green Lantern, l’homme s’avère être un vampire, venu avertir les héros d’un danger qui menace l’ensemble de l’Humanité, un danger qui a des crocs acérés et qui ne prospère qu’à la faveur de la nuit. Ainsi, Green Lantern apprend que les vampires, que l’on croyait relégués au rang de légendes, complotent contre les mortels et s’apprêtent à prendre le pouvoir. Pire encore, ils auraient infiltré les rangs des méta-humains. Chaque super-héros ou super-vilain est donc susceptible d’être un vampire, au service d’un mystérieux seigneur, qui prépare son arrivée au pouvoir. A qui se fier ? Qui parmi les héros a basculé dans le camp des suceurs de sang ?

Comme nous l’évoquions dans d’autres articles, les Elseworlds (l’équivalent des What If ? chez Marvel) sont l’occasion d’explorer des histoires au déroulement radical loin de la pression liée à la sacro-sainte continuité de l’univers principal. Ce procédé donne davantage de liberté aux auteurs, qui peuvent ainsi livrer leur version « définitive » de certains personnages ou de certains concepts, sans être entravé.

Ainsi dans les Elseworlds, on compte quelques histoires passionnantes comme Superman Red Son, Batman White Knight et ses suites, et plus généralement, l’ensemble des parutions du Black Label.

Ici, l’invasion des vampires peut paraitre absurde sur le papier, ou en tous cas digne d’une petite « levée des yeux au ciel ». Et pourtant, James Tynion parvient à s’emparer du concept (il faut lui reconnaitre une certaine maitrise du genre) pour livrer un scénario attractif, à un rythme très prenant.

En effet, dès l’introduction, on est happé par l’intrigue, qui s’inspire fortement de classiques du genre paranoïaque comme L’Invasion des Profanateurs, ou encore Secret Invasion. L’aspect whodunit et la tension croissante font donc tout l’intérêt de ce premier volume conspirationniste, pour le plus grand plaisir des fans. Bien évidemment, il est inutile d’être un lecteur assidu de DC pour apprécier cette mini-série, il faut simplement ne pas trop s’attacher aux personnages…

Bien sûr, on peut interroger certains éléments de l’intrigue, comme l’effet du vampirisme sur la personnalité des héros infectés. S’il est plus simple de saisir le concept avec la zombification, le vampirisme semble plus aléatoire, en tous cas ses effets sur la moralité. Par exemple, certains héros dont la volonté est la marque de fabrique cèdent instantanément à la corruption morale, tandis que d’autres héros plus borderline, semblent en capacité d’y résister. Qu’est-ce qui fait qu’un héros, qui a été du côté du bien durant toute sa vie, se dit soudainement, après avoir été mordu, que l’avenir appartient aux suceurs de sang, plutôt que d’être horrifié par ce qu’il est devenu ?

On aurait aimé que cette question soit davantage creusée, mais le plaisir de lecture est là malgré tout. Sur le plan graphique, Otto Schmidt donne à voir un trait anguleux et des couleurs dynamiques, qui tranchent avec l’ambiance paranoïaque et le côté « tout-le-monde-peut-mourir-à-tout-moment ».

La suite sera intitulée « All Out War« , il faudra donc troquer les soupçons et l’angoisse contre une bonne grosse baston à coups de pieux et d’eau bénite. Qui survivra ?

***·Comics·East & West·Nouveau !·Service Presse

Batman: Beyond the White knight

esat-west
batman-beyond-the-white-knight
Comic de Sean Murphy, Dave Stewart (coul.) et Simone Di Meo
Urban (2023) – DC (2022), One-shot.

Cette image a un attribut alt vide ; le nom du fichier est image-5.pngMerci aux éditions Urban pour leur confiance.

L’album s’ouvre sur une introduction rappelant le contexte du Murphyverse incluant White Knight, Curse of the White knight et White knight – Harley Quinn, puis les huit chapitres additionnés de deux intermèdes dessinés par Simone di Meo (illustrateur de We only find them when they are dead) et se conclut par huit pages de planches NB de toute beauté. A noter que comme depuis l’album Harley Quinn (dessiné par Matteo Scalera) Sean Murphy se fait coloriser par l’autre monstre incontournable de la colo de comics, Dave Stewart.

Bruce Wayne a la soixantaine lorsqu’il se voit contraint de s’évader du pénitencier où il purge sa peine. Car depuis la fin de Batman Néo-Gotham a surgi des plans fous du magnat Derek Powers, transformée en une dystopie dictatoriale où l’abolition du crime s’est accompagné avec celle des libertés. Alors qu’un nouveau Batman doté d’un costume ultra-technologique apparaît, un Wayne torturé par des crises d’angoisses devra affronter rien de moins que l’ex- Bat famille pour trouver la signification de ce qu’était Batman…

Batman: Beyond the White Knight (2022) - BD, informations, cotesEst-ce que Sean Murphy avait déjà les plans pour trois Batman lorsqu’il a entamé White Knight et sa refondation essentielle de cet univers? Je dois dire que jusqu’ici aucun doute n’était permis quand à l’ouverture grandissante et la multiplication des projets dans ce monde. Et même pas une once de méfiance quand à un risque de prolongation commerciale… Si les trois précédents albums étaient parfaitement réussis (avec le luxe de transformer un spin-off sur Harley en un nouveau chapitre marquant), cet hommage à la série animée Batman Beyond ressemble à une fausse bonne idée du jeune Murphy qui aurait dû laisser cette part de nostalgie là où elle était.

Car il y clairement deux albums dans ce Beyond the White knight. L’idée de reprendre le concept d’un vieux Batman projeté dans une Gotham du futur pouvait apporter des évolutions intéressantes quand aux relations interpersonnelles des acteurs du Batverse et sur ce plan l’album est assez réussi. On se plait à retrouver une Barbara Gordon ayant succédé à son père à la tête de la police, les deux Robin avec dix ans de plus et des enfants ayant poussé par-ci par-là. Travaillant la psyché de Wayne comme jamais depuis le génial Harleen, Sean Murphy continue de faire de la psychiatre blonde la création la plus intéressante de tout DC. Si l’on pourra trouver lourdingue l’artifice pour ramener le Joker (décédé aux précédents épisodes) comme une sorte d’hologramme mental, encore une fois cela permet de travailler les trauma du héros, sa schizophrénie supposée (le Joker n’est-il pas qu’une vue de l’esprit fou de Batman?). La relation aux « jeunes » aborde également le complexe de paternité de Bruce Wayne, maintenant que la figure d’Alfred n’est plus et l’auteur se permet même une très osée proximité plus qu’amicale avec Harley.

Batman has a new suit. Joker approves. [Batman: Beyond the White Knight #3]  : r/comicbooksBref, toutes les thématiques adulte prolongeant ce qui a été mise en place depuis le premier tome avec des hypothèses plus gonflées qu’aucun auteur ne se l’était permis sont passionnantes à suivre, ce qui aurait sans doute couronné du même succès ce volume que les précédents. Mais se rajoute ce vernis Beyond qui semble réchauffé tout le long avec un méchant et un néo-Batman qui n’intéressent jamais Murphy et sont expédiés sans aucune classe, jusqu’à l’apparition du Bat-chien qui fait douter de la santé mentale de Sean Murphy dans le genre « était-ce bien nécessaire » (même si le concept vient de l’animé Beyond).

Ainsi abimé par un certain nombre de personnages et d’une histoire inutiles, la structure White knight perd de sa force et l’on regrette amèrement que l’auteur n’ait pas assumé son projet solo jusqu’au bout en restant sur des hommages graphiques à la filmographie et certaines fulgurances graphiques dont il a le secret (je pense à l’excellente idée des ombres reflétant le surmoi héroïque des personnages sans masques, jusqu’à cette projection qui reprend la couverture du Dark Knight returns de Frank Miller).

Graphiquement Sean Murphy reste un designer de folie et possède de réelles visions même lorsqu’il fait joujou avec son armée de bat-robots. Mais on ne cesse de se demander pourquoi il s’est embourbé dans cette greffe inutile et incohérente avec son projet qui n’en avait pas besoin. Dommage de finir sa trilogie sur cette fausse note et espérons que les prochains spin-off, plus libres, rétablirons la qualité de ce Murphyverse qui reste la meilleure chose qui soit arrivée à Batman depuis la Cour des Hiboux.

note-calvin1note-calvin1note-calvin1

Manga·Nouveau !·***

EVOL #1-2

esat-west

evol-1-delcourt
Manga de Kaneko Atsushi
Delcourt (2023) – (2021), 275p./volume, 2/5 volumes parus, série en cours.

image-5Merci aux éditions Delcourt pour leur confiance.

Dans un Japon alternatif trois adolescents se retrouvent dans un hôpital après avoir tenté de se suicider. Alors qu’ils sont contraints de suivre une thérapie dans cette prison médicale, ils réalisent qu’ils ont acquis d’étonnants pouvoirs supra-humains. Pourtant chacun sait que ce type de pouvoirs ne se transmet que par héritage génétique… Pendant qu’ils tentent de s’évader au risque de devenir des ennemis publics numéro 1, le duo de super-héros qui assure la sécurité de la ville (et accessoirement le pouvoir du maire) a le pressentiment que des forces maléfiques sont sur le point de se réveiller…

J’ai découvert le travail de Kaneko sur sa précédente trilogie, le dérangeant mais très réussi Search and Destroy. L’auteur avait déjà marqué les esprits avec Wet Moon ou Deathco, et jouit d’une assez rare moyenne de notation de 17/20 sur le site référence Manganews, en alternant les genres mais toujours avec un aspect nihiliste marqué et un style graphique aussi fort que classique. Sur sa nouvelle série, le voilà qui aborde le genre super-héroïque avec une influence toujours aussi marquée par la sous-culture underground américaine. Si son trait (où les trames sont quasiment absentes) s’inscrit dans les pas du maître Will Eisner ou d’un Craig Thompson, l’influence du récit serait plutôt à chercher du côté du Watchmen d’Alan Moore dont les couvertures s’inspirent.Critique] EVOL T01 & T02 - Chromabox

S’ouvrant sur une scène choque et ultraviolente qui nous plonge d’emblée dans le monde sans filtre de Kaneko, la série (dont les deux premiers tomes sout publiés simultanément) évolue ensuite vers une classique histoire d’ado-parias qui sont soit rejetés par la société soit victimes d’agressions sordides. Ce qui crée l’intérêt c’est l’aspect absurde des pouvoirs assez pitoyables de ces trois-là et l’inversion des rôles entre un Gardien travaillant pour un pouvoir politique corrompu et de jeunes héros décidés à « tout cramer » (le manga de Kaneko sort à point nommé dans nos contrées…). Résolument punk, l’auteur maitrise toujours très bien le rythme de son récit qui alterne les contextes et les intrigues de façon variée sans que l’on sache trop comment il va boucler avec le démarrage tonitruant de sa série.

Après la révélation des pouvoirs et une tentative d’évasion les atermoiements de mal-être ralentissent un peu le rythme jusque là dynamique et offrent le sordide attendu sans encore véritablement rejoindre l’intrigue du héros Lightning Volt. On finit cette double lecture plutôt intéressé mais en attente d’une reprise de rythme pour assumer le code de l’anti-super héro.

***·Comics·East & West·Nouveau !·Service Presse

Radiant Black #2

esat-westcouv_465298

Comic collectif.
Delcourt (2023), Ed US Image comics (2021), 176p., 2/3 tomes parus.

Attention spoilers!

bsic journalism

Merci aux éditions Delcourt pour leur confiance!

Alors que Marshall déchaîne sa vengeance contre le Radiant rouge qui a envoyé son meilleur ami à l’hôpital, surgit un nouvel être surpuissant qui exigera une alliance imprévue entre les quatre couleurs qui viennent tout juste de réaliser qu’ils ne sont pas seuls. Un combat qui va leur révéler un danger cosmique face auquel leurs combinaisons semblent bien dérisoires…

Radiant Black #10 Blacklight Edition | Image ComicsBonne surprise qui a rafraichi l’an dernier le récit superhéroïque, Radiant Black continue à casser les codes et les attendus dans ce second tome assez perturbant dans son déroulement. L’habillage « power rangers » du projet avait tout du produit formaté mais le scénariste rompait immédiatement ce schéma en changeant très tôt de porteur du radiant en ouvrant la possibilité d’une série centrée sur un héros pluriel plutôt que sur  une équipe de héros. Cette suite va confirmer cela puisque hormis la très énergique et fun première partie centrée sur la baston planétaire des quatre « couleurs » contre leur adversaire, on va suivre la version Marshall du Radiant black en continuant à visiter la vie des millenials et des réseaux sociaux (notamment sur le récit secondaire dédié à Rose et bien moins réussi que celui de Rouge).

Alors que l’on s’attend à voir se construire l’équipe, les personnages sont en réalité éparpillés assez rapidement en nous laissant voir Marshall tenter de sauver son ami et nous révéler une guerre galactique qui semble liée au Radiant et à l’antagoniste que les amis sont parvenus temporairement à contrer. On passe donc d’un premier tome plutôt original et intelligent dans l’histoire d’un auteur en dépression de page blanche à tout autre chose. Dans une grande liberté vis à vis de leur lecteur, les auteurs expérimentent ainsi des idées graphiques plutôt gonflées lorsque le héros se retrouve dans le monde du Radiant afin de sauver l’âme de son ami. D’un tempérament très différent de Nathan, Marshall va devoir assumer les conséquences des distorsions de l’espace-temps que semblent créer ses pouvoirs. Le lecteur continue d’assister à tout cela avec un grand mystère mais bien accroché pour tenter de comprendre l’origine de tout cela.

Ainsi bien plus proche du travail d’un Mark Waid que d’un produit formaté disneyien, Radiant Black maintient son originalité en proposant quelque chose que l’on n’attend pas, dans un équilibre solide entre introspection relationnelle et baston cosmique.

note-calvin1note-calvin1note-calvin1

***·Comics·East & West·Nouveau !·Service Presse

Flashpoint Beyond

Histoire complète de DC Comics en 216 pages, écrite par Geoff Johns et dessinée par Xermànico. Parution en France chez Urban Comics le 17/03/2023.

Merci aux éditions Urban pour leur confiance.

Ça flash pour moi

Il y a quelques années, Barry Allen, plus connu sous le nom du héros ultra-rapide Flash, a tenté le tout pour le tout alors qu’il cherchait à sauver sa mère Nora, d’une mort horrible aux mains du NegaFlash. Utilisant ses pouvoirs à leur acmé, Flash a remonté le temps jusqu’à l’instant fatidique pour modifier le cours du temps.

Effet Papillon oblige, l’Histoire entière se réécrit autour de ces changements. Barry s’échoue alors dans un monde qui lui est étranger, dans lequel tout ce qu’il a connu, ses proches, les héros qu’il a cotoyés, les événements historiques, tout a été modifié de façon drastique. Dans cette nouvelle ligne temporelle, Barry n’est jamais devenu Flash, le monde est ravagé par une guerre totale entre le peuple de Wonder Woman, les Amazones, et celui d’Aquaman, les Atlantes, et, cerise cosmique sur le gateau de l’ironie, Superman n’a jamais fait d’apparition publique sur Terre. Barry se rend d’autant plus compte de la portée de son geste lorsqu’il découvre que le Batman de ce nouveau monde n’est pas Bruce Wayne, mais bien son père Thomas, leurs rôle ayant été échangés lors de la nuit fatidique dans Crime Alley. Loin de l’idéal de Justice poursuivi par Batman-Bruce, le Batman de Flashpoint est un justicier violent et cruel, qui n’agit que pour se venger, encore et encore, du crime qu’il a subi.

Néanmoins, Barry parvient à convaincre ce nouveau Batman de l’illégitimité de cette ligne temporelle et de la nécessité de la rectifier. Avec l’aide d’autres héros, et notamment de Batman qui tue Nega-Flash, Flash parvient à récupérer ses pouvoirs et revient une nouvelle fois dans le temps pour corriger son erreur, fusionnant avec son lui plus jeune, et donnant ainsi naissance à un nouvel univers DC, que l’on découvre dans les New 52.

Il est plus tard révélé que l’entité qui est à l’origine de certaines modifications qui ont permis à ces événements de se produire n’est autre que le Docteur Manhattan (oui, celui de Watchmen), corrompu par une entité qui lui encore supérieure, les Grandes Ténèbres. Le Batman de Flashpoint, quant à lui, n’a pas complètement disparu, car on le revoit ensuite dans la Justice League Incarnate, qui lutte justement contre la crise multiverselle provoquée par les Grandes Ténèbres. Désintégré par Darkseid à l’issue de la saga, Thomas Wayne /Batman se réveille néanmoins en vie, de retour dans la ligne temporelle aberrante qu’il avait contribué à effacer. Comment s’est-il retrouvé là ? S’il est bien en vie, alors qu’est-il advenu de la ligne originelle, celle qui abrite le fils pour qui il a tout sacrifié ?

Geoff Johns revient une nouvelle fois sur le devant de la scène DC Comics pour prolonger le récit qui lui avait à l’époque permis de rebooter l’univers, en le liant à la crise qui occupe actuellement les esprits. Flashpoint Beyond débute en mettant de coté le paradoxe moral et philospohique qui était posé dans la série initiale. En effet, dans Flashpoint, on apprenait donc que la ligne temporelle pouvait supporter qu’un antagoniste (Nega-Flash) puisse modifier son cours en tuant une personne innocente (Nora Allen), sans conséquence particulière pour lui ni pour l’univers, tandis qu’elle s’effondre complètement si un héros tente de réparer ce tort. L’univers DC était donc en faveur du Nega-Flash ! Cela dit, cette morale ambigue permet à Barry Allen de comprendre qu’il ne peut pas employer les mêmes méthodes que son ennemi juré et s’attendre à des résultats différents sous couvert de ses bonnes intentions.

C’est sans doute pour cela que le récit est centré autour de Thomas-Batman, et de sa volonté de tout sacrifier à nouveau afin de restaurer l’univers une seconde fois. La thématique du regret et d’une ligne temporelle apocalyptique issue de l’incapacité d’une personne à faire son deuil rappelle directement l’excellente série Dark, ce qui ajoute un niveau de profondeur à l’univers de Flashpoint.

Et c’est là que la morale de fin est également rendue ambigue par l’auteur, car là où Thomas-Batman refusait d’accepter la perte de Bruce et sacrifiait un univers entier pour permettre à son fils de vivre, Bruce-Batman s’accroche également au souvenir d’un père hypothétique (qui est devenu l’antithèse de ce qu’il défend, il est utile de le mentionner) et prend des risques anormalement élevés afin de le préserver à son tour…

Néanmoins, la fin offerte par ce Flashpoint Beyond demeure satisfaisante sur le plan émotionnel, et ouvre des pistes suffisamment inquiétantes pour suscier l’intérêt du lecteur quant à la suite. Il faut admettre que Johns sait ménager ses effets et le rythme de ses révélations tout au long des sept chapitres de la mini-série, permettant une lecture haletante, à l’action bien dosée.

*****·Comics·East & West·Nouveau !·Service Presse

Catwoman: Lonely City

Histoire complète en 224 pages, écrite, dessinée et mise en couleur par Cliff Chiang. Parution en France chez Urban Comics, collection Black Label, le 10/02/2023.

Merci à Urban pour leur confiance.

Le retour du Chat

Selina Kyle, alias Catwoman, sort du pénitentier hautement sécurisé de Blackgate après une peine de dix ans. Il y a dix ans, Selina n’a cependant pas perdu que sa liberté. Durant ce que les journaux auront plus tard baptisé la Nuit du Fou, elle a perdu l’amour de sa vie, le milliardaire orphelin Bruce Wayne, plus connu sous son identité de Batman.

Lors d’un énième affrontement contre son ennemi juré, le Joker, Batman, ainsi que son ami le commissaire Gordon et son allié Nigthwing, sont morts, laissant Gotham endeuillée, et Catwoman brisée. Heureusement, rien ne dure éternellement, pas même la prison, aussi notre féline anti-héroïne finti-elle pas retrouver sa liberté, quelque peu usée et amère, mais toujours vivante.

La compagne de Batman retrouve donc Gotham, sans toutefois la reconnaître. En dix ans, beaucoup de choses ont changé, comme par exemple le fait que plus aucun personnage costumé, qu’il soit héroïque ou criminel, n’a fait d’apparition depuis la Nuit du Fou. Harvey Dent, que tous connaissaient sous son tristement célèbre sobriquet de Double-Face, s’est rangé et est devenu maire de la ville, instaurant une sorte de municipalité policière, grâce à une armée de Bat-Cops peu frileux quant à la brutalité de leurs méthodes.

Sous le mandat de Dent, les inégalités qui frappaient Gotham et généraient le crime n’ont fait que s’aggraver, menant à la gentrification de certains quartier et à l’abandon de beaucoup d’autres. En parlant de crime, il est une invariable statistique en criminologie, stipulant que les quelques semaines qui succèdent une sortie de prison sont les plus susceptibles de voir l’ancien criminel replonger.

Qu’adviendra-t-il alors de Selina ? Renouera-t-elle avec son passé criminel dans cette nouvelle Gotham, ou demeurera-t-elle fidèle à la dernière promesse qu’elle fit à Batman ?

Depuis maintenant trois ans, Urban exploite les titres du DC Black Label, une collection hors-continuité dont la liberté de ton permet des revisites très pertinentes de personnages connus. Ainsi, Wonder-Woman, Batman, encore Batman, et encore encore Batman, et encore et toujours Batman, ont eu droit à leur récits alternatifs. Ce Lonely city sorti fin 2021 était très attendu et repoussé plusieurs fois par l’éditeur français. Hâte de voir si le Black Label allait continuer son quasi sans-faute…

Catwoman, héroïne ambivalente, mérite elle aussi son spotlight, et il faut bien admettre que Cliff Chiang s’y prend diablement bien. Au premier abord, difficile cependant de ne pas avoir en tête le Dark Knight Returns de Frank Miller, mettant en scène le retour d’un héros vieillissant dans une ville qu’il ne reconnaît plus.

Le pitch est sans aucun doute similaire, mais là où Miller laissait transpirer ses opinions droitisantes, voire fascisantes, Chiang livre un propos plus moderne, et sans doute aussi, plus démocrate. La diatribe politique n’étant clairement pas l’objectif de l’oeuvre, l’auteur se concentre néanmoins sur le développement de son personnage, au travers du deuil de Selina, et comme on s’en doute, de la vie de l’une qui continue après la mort de l’autre.

Quant à l’intrigue, il n’y a pour ainsi dire pas grand chose à reprocher à l’auteur. Ce dernier utilise à bon escient tous les élements du film de casse, à savoir:

  • Une structure ternaire rassemblement de l’équipe / préparation / exécution
  • Un objectif illégal qui nécessite d’investir une place forte, à savoir s’introduire dans la Batcave, surveillée par les autorités.
  • Un plan, qui consiste à s’y introduire durant la nuit des élections.
  • Des étapes du plan où interviennent des complications progressives, forçant les héros à improviser.
  • Il est d’ailleurs intéressant de noter, à titre informatif, qu’en fiction, plus un plan est connu et limpide, plus ses chances de succès sont minces, alors qu’un plan qui est établi à l’insu du lecteur aura un succès quasi garanti.

Tout cela fonctionne donc à merveille, surtout si l’on ajoute le mystère du contenu véritable de la Batcave, dont on se doute qu’elle ne contient pas seulement la Batmobile et quelques gadgets mineurs. Entre histoire de braquage et contemplation amère du temps qui passe, Catwoman Lonely City est une nouvelle réussite du Black Label de DC. Et un nouveau coup de coeur !

****·Comics·East & West·Nouveau !

Ultraman #2: Mise à l’épreuve

Suite de la série éditée par Marvel, avec Kyle Higgins et Mat Groom au scénario, Francisco Manna au dessin. Parution en France chez Panini le 21/09/22.

Grand héros, gigantesques problèmes

Au printemps dernier, nous assistions à la renaissance d’Ultraman, icône nippone de la pop culture, colosse interstellaire venu sur Terre pour la protéger des Kaijus qui veulent la boulotter. Malheureusement, à peine débarqué, Ultra est abattu par Shin Hayata, un jeune homme impétueux et zélé qui souhaitait prouver sa valeur auprès de la PSU, la Patrouille Scientifique Unie.

Afin de réparer son erreur, Shin offre à Ultra son essence et fusionne avec lui, devenant ainsi Ultraman. Le duo étrange est donc forcé de collaborer pour sauver l’Humanité d’une menace qu’elle ignore mais qui ne tardera pas à se révéler aux yeux du public. Ultra, quant à lui, se voit fortement entravé dans sa mission secondaire, qui était de retrouver son frère, venu sur Terre soixante ans plus tôt et dont il n’a plus de nouvelles.

A la fin du premier tome, Shin était contraint d’éventer le secret de l’existence des Kaijus en se transformant en plein Tokyo pour affronter une bête gigantesque. La victoire fut arrachée in extremis et eut même un prix, celui de libérer toutes les bêtes précédemment capturées par la PSU, qui étaient enfermés dans une dimension de poche à défaut de pouvoir être vaincus.

Shin, Ultra, leur amie Kiki Fuji et la PSU doivent donc oeuvrer dans un monde choqué et méfiant, qui ne croit pas davantage en ses sauveurs qu’aux Kaijus. En effet, les héros ne doivent pas seulement faire face à des hordes de monstres toujours plus puissants, ils sont aussi contraints d’affronter la défiance de la population, qui prend forme de façon radicale avec un groupuscule qui croit dur comme fer au complot malgré les preuves.

Après une remise au gout du jour efficace, Ultraman revient dans un second tome qui explore la relation entre Shin et Ultra, notamment par le biais du parallèle qui existe entre les deux héros. Le ressort le plus efficace de ce second tome reste néanmoins l’écho que font les auteurs à notre monde, en misant sur le fait que l’authenticité des attaques de Kaijus fasse l’objet de théories complotistes. Des gens qui nient l’évidence et la réalité, et soutiennent des absurdités en dépit des preuves, ça nous rappelle nécessairement les dérives actuelles, comme nous l’avons vu très récemment avec Department of Truth.

Coté action, on reste sur quelque chose de bien sage, surtout comparé à la tornade de violence proposée par Ultramega de James Harren, qui pastichait déjà le héros cosmique en adoptant le point de vue du quidam qui se fait piétiner. La série Ultraman poursuit donc son petit chemin, grâce à ses protagonistes sympathiques et ses thématiques actuelles.

****·Comics·East & West·Nouveau !

We Live #2: l’ère des Palladions

Second volume de la série écrite par Inaki et Roy Miranda. Parution en France chez 404 Comics le 10/11/22.

Mais t’es pas là, pas là, pas là, Palladion

Dans le premier volume de la série, les frères Miranda nous emmenaient dans un monde postapocalyptique dans lequel l’Humanité était traquée par des hordes d’animaux mutants sur une Terre désolée. Seuls quelques élus étaient promis au Salut, grâce à 9 balises réparties sur la planète, supposées les emmener sur une nouvelle planète.

Hototo et sa grande soeur Tala, deux orphelins en perdition, ont fait route vers l’une de ces balises, juste avant la fin du compte à rebours, afin de sauver la vie d’Hototo, qui comptait parmi ces élus. A la fin du décompte, nos héros, ainsi que l’Humanité entière (ou ce qu’il en reste), découvrent la vérité sur ces fameuses balises. Elles ne sont en rien une promesse de salut parmi les étoiles, mais un moyen de défense, un rempart ultime contre les menaces extérieures, qui donnent aux élus des pouvoirs grandioses.

Ainsi, Hototo est transformé et devient un super-héros, comme il en a toujours rêvé. Mais un tel pouvoir n’est-il pas trop grand pour les frêles épaules d’un enfant ? C’est ce que nous découvrons six ans après, dans le volume 2 de We Live.

Hototo et tous les autres élus sont devenus les Palladions, sortes de titans aux pouvoirs cosmiques, chargés d’affronter tous les monstres qui pullulent sur Terre et se pressent aux portes des 9 derniers bastions humains. Tala, quant à elle, a rejoint la force de défense, et assiste comme elle le peut son jeune frère. Cependant, les ennemis sont de plus en plus nombreux, les ressources s’amenuisent, et la source d’énergie des balises, la Frappe, menace de céder, privant ainsi les Palladions de leurs pouvoirs et exposant les survivants à une mort quasi-certaine.

En novembre dernier, nous décortiquions Refrigerator Full of Heads afin de déterminer les ingrédients essentiels d’une bonne suite, et dégagions ainsi quatre axes principaux: Une Ellipse, du Changement de paradigme, plus d’Enjeux, et du Neuf dans les personnages.

Le volume 2 reprend six ans après le fin du voume 1, ce qui satisfait à la première exigence. S’agissant du paradigme, il ne s’agit plus d’arriver à temps à la balise pour quitter la Terre mais bien de la défendre à tout prix. On passe donc d’une course contre le temps à un état de siège, ce qui est un changement conséquent dans la dynamique du récit et de ses enjeux. Pour ce qui est du neuf dans les personnages, on a certes quelques ajouts parmi le casting secondaire, mais les deutéragonistes sont toujours Hototo et Tala, bien qu’ils aient tous deux évolué.

De ce point de vue, donc, on peut considérer que l’Ere des Palladions est une suite appropriée. On suit encore avec implication les mésaventures de nos deux héros, dont la relation continue d’être développée, bien qu’ils n’aient pas beaucoup de scènes en commun. Il faut reconnaître que l’accent est ici mis sur l’action et les enjeux externes, plutôt que sur le parcours interne et émotionnel des personnages. Les combats grandioses et épiques, souvent en double-page, s’octroient une part léonine de l’album, peut être au détriment de la clarté ou de l’émotion qui caractérisaient le précédent volume. Pour illustrer ce point, on peut évoquer certains passages tonitruants où encore des transitions abruptes qui sont quelque peu déstabilisantes. Nouveau point qui n’était pas présent dans le tome 1, certains récitatifs un peu abscons, dont l’opacité ou la syntaxe sybilline peuvent être dus à la traduction…

Néanmoins, le volume 2 satisfaira les lecteurs ayant apprécié l’univers foisonnant que les frères Miranda ont mis en place.

*****·Comics·East & West·Rétro

Batman: Amère victoire

image-30

couv_159093
Comic de Jeff Loeb et Tim Sale
Urban (2012) – DC (2000), 392p., série terminée.

L’édition chroniquée est la première version reliée chez Urban, après les quatre volumes SEMIC souples parus en 2002 juste après l’édition originale. Une version n&b « anniversaire 75 ans » est sortie en 2014 toujours chez Urban. Il s’agit de la suite directe de Un long Halloween, mythique album et Prix Eisner du meilleur album. L’édition comprend une préface de Tim Sale (malheureusement disparu l’an dernier…), un résumé du volume précédent, deux pages de croquis et l’épisode bonus « Un chevalier servant« . Édition correcte qui mérite surtout pour la qualité de fabrication des éditions Urban et l’histoire elle-même.

Il y a un an (lors des évènements relatés dans Un long Halloween) le tueur se faisant appeler Holliday a terrorisé Gotham. Lors de l’enquête le procureur Harvey Dent, défiguré par de l’acide, est devenu Double-face, un psychopathe schizophrène. Alors que Batman et le commissaire Gordon n’ont pas fait le deuil de leur amitié avec Dent, des crimes reprennent, ciblant cette fois la police de Gotham. Holliday est-il de retour?

image-10Batman - Amère victoire (Dark Victory) - BD, avis, informations, images,  albums - BDTheque.comQue vous découvriez les BD de Batman ou soyez novice en comics de super-héros, vous tenez une pépite. Lorsque j’ai commencé à lire du  Batman j’ai recherché les albums les plus faciles d’accès parmi les plus cités, la difficulté étant la subjectivité des fans pas toujours lucides sur l’accessibilité de leurs monuments. Et je peux vous dire que le diptyque de Loeb et Sale est un véritable miracle tant graphique que dans l’écriture, qui condense la substantifique moelle de l’univers gothique de Batman, de l’origin story fluide, en proposant le même plaisir à des nouveaux venus, aux spécialistes et aux amateurs d’indé. La seule réserve sera peut-être pour de jeunes lecteurs biberonnés aux dessins très techniques d’un Jorge Jimenez ou de Capullo, qui pourront tiquer sur l’ambiance rétro.

Amère victoire reprend les mêmes qualités que le volume précédent en les simplifiant dans une épure encore plus accessible. Sous la forme d’une enquête autour d’un serial killer qui reprend le même schéma narratif que les meurtres aux fêtes nationales du Long Halloween (ici concentrés sur des membres véreux du GCPD), les auteurs continuent subtilement d’introduire le personnage de Robin sur la fin de la série, en Batman (tome 1) - (Tim Sale / Jeph Loeb) - Super Héros [BDNET.COM]parallèle évident avec le deuil du jeune Bruce Wayne. Si le monde mafieux est toujours très présent (le récent film The Batman reprend à la fois la famille Falcone et le lien de Catwoman avec ces criminels), le découpage se veut moins complexe en atténuant un peu le formidable jeu des séquences simultanés et amputées qui instillaient brillamment le doute sur l’identité du tueur. Ici ce sont Harvey Dent, la nouvelle procureur et même Catwoman qui sont dans le viseur du lecteur…

Beaucoup plus technique qu’il n’en a l’air, le dessin de Tim Sale est mis en valeur par le format large du volume Urban où l’on profite des grandes cases (à ce titre, la grosse pagination ne doit pas vous effrayer, l’album se lit assez rapidement du fait d’un découpage aéré et de textes favorisant les ambiances), voir de doubles pages et où les très élégants aplats de couleurs font ressortir le travail de contrastes du dessinateur (agrémenté de quelques lavis sur des flashback). Avec un montage diablement cinématographique (Loeb a scénarisé un certain nombre de séries de super-héros et produit les séries Daredevil et Defender de Netflix) on plonge dans les bas-fonds, les bureaux éclairés de lames de stores et les gargouilles des sommets de Gotham avec un plaisir permanent.

Amère Victoire – Comics BatmanProposant autant de suspens que d’action, utilisant à l’envi le freakshow d’Arkham sans en faire le centre de l’histoire, Amère victoire offre une galerie de personnages aussi archétypaux que le nécessite la mythologie Batman, avec un joyau super: Catwoman, aussi pétillante que touchante malgré son absence d’une bonne partie de l’histoire (… pour cause d’aventures à Rome narrées dans le chef d’œuvre du même duo, Catwoman à Rome, tout juste réedité). L’art de Loeb est de prêter un style oral à chaque personnage, reconnaissable et que l’on a envie de retrouver. Et finalement la résolution du coupable deviens assez secondaire dans le projet tant il y a de prétendants et une atmosphère que l’on regrette dans les récents comics Batman. On pourra d’ailleurs des liens à travers les âges en trouvant des proximités avec le récent White Knight: Harley Quinn… dont les couleurs sont réalisées par le grand Dave Stewart… qui avait officié sur Catwoman à Rome. Les grande se retrouvent!

Chef d’œuvre parmi les chef d’œuvres, bien moins cité et bien meilleur que le Dark Knight de Miller, cet Amère Victoire est un classique à avoir impérativement bien au chaud dans sa bibliothèque.

note-calvin1note-calvin1note-calvin1note-calvin1note-calvin1