***·BD·Nouveau !·Service Presse

La maison Usher

BD de Jean Dufaux et Jaime Calderon
Delcourt (2023), 54 p., One-shot.

Album grand format avec dos toilé, titre gaufré et la nouvelle d’Edgar Poe en fin d’album.

bsic journalismMerci aux éditions Delcourt pour leur fidélité.

La Chute de la Maison Usher est une des nouvelles les plus célèbres de l’immense Edgar Poe, qui a inspiré nombre d’œuvres musicales, cinématographiques ou BD. Netflix vient de diffuser la première saison d’une variation audiovisuelle et au moins trois autres adaptations BD sont déjà parues avant cette originale version de Jean Dufaux.

L’originalité de ce one-shot est d’élargir librement l’histoire du personnage principal en imaginant une classique fuite devant un créancier violent. Le surgissement surnaturel d’un fiacre semblant sorti des Enfers permet à Damon Price, cousin du riche Rodrick Usher (son ami d’enfance dans la novelle) d’échapper à un assassinat et de découvrir la fameuse maison qui donne son titre au récit et fait office de personnages à part entière. Cet ajout permet d’installer une atmosphère vénéneuse et de caractériser cet antihéros qui abuse de l’amour d’une belle prostituée et de multiplier les antagonistes redoutables de violence avant de confronter le personnage à la maison et son propriétaire. Dufaux fait également œuvre de facétie en insérant Edgar Poe dans le récit avec une mise en Abîme intellectuellement très attrayante où l’auteur raconte au personnage son propre récit…

Les planches de Jaume Calderon (qui spécialisait jusqu’ici sa redoutable technique sur des récits historiques) nous plongent immédiatement dans une ambiance que ne renierait pas Tim Burton, où les grandes cités de la côte Est ne sont encore que des bourgades aux maisons de bois et aux ruelles tortueuses et où les brumes de la campagne n’attendent plus que de laisser émerger esprits et non-morts… La violence du récit de Jean Dufaux est sèche et le scénariste ne laisse que peu de possibilité de compassion pour son personnage qui va se retrouver

(un peu facilement) dans les griffes d’Usher. S’agissant d’un conte noir le lecteur n’attend pas tant de la vraisemblance que de l’immersion et en la matière le projet est tout à fait réussi. Ainsi lorsque le maître des lieux nous conte le destin tragique de sa sœur entre chandeliers gothiques et qu’il promène son invité dans les marais environnants on n’est guère surpris de voir surgir des forces surnaturelles aussi normales à cet emplacement que le cocher aveugle qui a sauvé Price ou la maison dont les portraits semblent vivants. Dans ce type de récit le personnage n’est qu’un focus à une narration linéaire. Pour une adaptation d’un classique on peut dire que les auteurs réussissent à nous surprendre, ce qui était une gageure.

Avec des planches somptueuses, un texte inspiré et une action qui évite de limiter le projet à de la seule horreur gothique, Dufaux et Calderon nous proposent avec ce one-shot une élégante proposition fantastique qui sait enrichir le matériau d’origine et, cerise sur le gâteau, permet de lire le texte de Poe présent en fin d’album et lui comparer l’adaptation. On a trouvé pire comme découverte d’un texte célèbre.

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Notre-Dame de Paris

BD de George Bess
Glénat (2023), 208 p., One-shot.

Comme pour les précédents « classiques » de Bess chez Glénat, l’éditeur propose l’album en deux version, l’habituelle à couverture noire et la « prestige » grand format dotée d’une couverture couleur.

bsic journalismMerci aux éditions Glénat pour leur fidélité.

En cette fin d’année nous sommes servis en adaptations de grands classiques du roman moyen-ageux après le Nom de la Rose de Manara. Désormais spécialiste des adaptations littéraires, Geoges Bess débarque cette fois au XIX° siècle sur le plus connu des romans de Victor Hugo, reprenant la maquette d’édition de Dracula et Frankenstein. Le projet était aventureux, comme pour Dracula, tant le récit a été mille fois proposé, jusqu’à s’éloigner du cœur du texte. Et ce sera la principale qualité de cette belle version qui s’étale sur XXII chapitres (contre une cinquantaine dans l’œuvre originale) que de rester étroitement proche du récit initial en nous rappelant l’immense modernité de Victor Hugo qui pointe la pesanteur des traditions (d’en haut comme d’en bas) et le drame des passions humaines.

Esmeralda apparaît comme la candeur, plus que la beauté, qui aspire à une vie simple et victime de la jalousie maladive d’un puissant, l’abbé Frolo. Souvent ramenée à l’amour (fraternel) de la belle et la bête, cette histoire est à l’origine plus celle de la bohémienne et de l’abbé au sein d’une société d’injustice où les gueux ne sont guère plus éclairés que les puissants. Multipliant les protagonistes en refusant la linéarité comme dans toutes ses œuvres, Hugo aborde la complexité des passions, des hasards et des drames humains et la BD permet par la concision du format d’éviter les longues digressions qui rendent parfois le texte exigeant. En lisant cet album on se rappelle combien ce ré&cit est la matrice d’une infinité de grandes séries BD telles Sambre ou le Roy des Ribauds par exemple.

La version de Bess est peu une BD, le dessinateur déroulant son récit essentiellement par des cartouches narratifs entrecoupés par quelques scènes fortes de véritable BD. Graphiquement, si la première moitié se hisse au niveau de précision de Dracula, tant dans les décors, les éléments décoratifs qui font le sel des planches de Georges Bess, on sent sur la fin que la charge de travail sur une telle pagination l’a poussé à l’économie, multipliant les fonds vides et certains décores à peine encrés. Le choix de textures de niveau de gris permet de densifier les cases et le jeu de lumières dans une Cité qui est un personnage à part entière de l’histoire.

Le rendu global est une lecture très plaisante, immersive qui prend une partie du talent de Victor Hugo embelli par un graphisme de haut niveau et quelques sublimes pages. La grosse pagination augmente le risque de dessins inégaux mais on ne pourra constater que l’auteur maintient une générosité générale et une passion pour ce texte évidentes. Une excellente occasion de lire ou relire ce chef d’œuvre du patrimoine littéraire français et d’ajouter un nouveau joyau à la collection d’adaptations de Georges Bess. En attendant avec impatience de connaître le prochain choix qu’il nous livrera…

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Le nom de la rose #1/2

BD de Milo Manara
Glénat (2023), 60p., 1 tome paru sur 2.

Merci aux éditions Glénat pour leur confiance.

A la demande du fils d’Umberto Eco, le maître Milo Manara se lance dans un pari d’adapter le gros roman, le monument de la littérature et de l’imaginaire qu’est Le Nome de la Rose. Pari car chacun a en mémoire les images, les gueules des moines du non moins chef d’œuvre de Jean Jacques Annaud qui adaptait l’ouvrage au cinéma en 1986. On n’est pas inquiet sur la capacité artistique de Manara à proposer un bel ouvrage mais bien sur la marge de manœuvre entre le texte et le film.

Même s’il est fort dommage que l’éditeur n’ait pas opté pour un unique one-shot qui aurait été approprié pour un projet aussi prestigieux, la lecture de ce premier volume est un grand plaisir qui forme une sorte de chainon manquant entre le texte d’origine et la pellicule. En assumant sa propre imagerie médiévale bien connue des habitués le dessinateur se démarque immédiatement, sans complexes, de l’univers de JJ Annaud et nous permet alors de nous plonger dans le cœur du roman. Texte intellectuel, érudit, complexe et bardé de références historiques et religieuses, Le Nom de la Rose n’est pas simple à appréhender et la BD risque d’en laisser quelques uns sur le carreau avec ses quelques dialogues en latin et le contexte détaillé des conflits monastiques et hérésies du quatorzième siècle. Certaines traductions et explications en annexes auraient pu être utiles pour démocratiser l’accès mais reconnaissons que ce n’est pas du tout bloquant.

Pour ceux qui découvrent ce récit, il s’agit d’une redoutable enquête médiévale menée par un ancien inquisiteur inspiré de Sherlock Holmes, menant un jeune novice qui va découvrir le monde fermé d’une abbaye enneigée. Beaucoup plus aéré que le film, la BD prend le temps de nous faire rencontrer la fantastique galerie de personnages en accentuant l’importance sur des figures là-aussi différentes du long-métrage. Surtout, Manara se fait plaisir et nous fait plaisir en alternant les reproductions type enluminures, caricatures grossières et monstrueuses, en regard de gravures et de visions allégoriques dont il a le secret. Les visages qui alternent de l’hyper-réalisme et caricature, sont

saisissants et rappellent à tous combien Milo Manara est un grand artiste. L’immersion dans le contexte médiéval est pleine, entre ces chroniques des pastoureaux et de Fra Dolcino, les visions piranesiennes de cuisines et d’architecture et cette passion pour l’art graphique populaire qui ornait les frontons des cathédrales. L’artiste semble né pour illustrer cette époque comme une bonne partie de son œuvre non érotique l’a montré.

Remarquablement rythmé assez sage au vu du matériau d’origine et des propensions de Manara à partir dans des délires mystiques illustrés, ce premier tome est une vraie bonne BD qui coche toutes les cases du plaisir textuel comme graphique et permettra à certains de découvrir enfin une histoire qu’ils n’ont jamais osé ouvrir. Héraut de l’art populaire exigeant, Milo Manara à 78 ans montre qu’il reste un sacré conteur en plus d’être un géant du dessin.

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***·BD·Nouveau !

Shibumi

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BD de Pat Perna et Jean-Baptiste Hostache..
Les Arènes (2022), 224 p. One shot.

Pays-Basque, années soixante-dix. Une jeune femme pourchassée par les assassins de la Mother Company vient chercher l’aide de Nicholaï Hel, assassin imparable et maître de Go. En passant sa porte elle ramène à celui qui avait réussi à se faire oublier toute l’âme noire de l’Amérique de l’après-guerre. Un conflit stratégique, moral et personnel…

https://www.actuabd.com/local/cache-vignettes/L720xH999/shib3-63d68.jpg?1664017880Adepte des récits historiques sur les personnages sombres Pat Perna ne choisit pas la facilité en adaptant l’inclassable roman Shibumi qui raconte autant l’action malfaisante et immorale des Etats-Unis de la Guerre Froide que l’itinéraire spirituel d’un assassin mystique. Adaptant visiblement avec fidélité l’ouvrage, le scénariste prend le risque de ne pas compenser le refus de l’action qui semble émaner de la source.

S’ouvrant comme une tonitruante histoire d’espionnage dystopique avec une scène introductive de massacre à l’aéroport de Rome, Shibumi nous présente immédiatement le contexte et l’adversaire: une tentaculaire World company avant l’heure qui synthétise tout le conspirationnisme issu des actions de la CIA pendant la Guerre Froide et l’essence capitaliste de la nation dont les intérêts économiques priment sur tout autre. Organisme tout puissant, la Mother company va jusqu’à contrer l’alliance idéologique historique des Etats-Unis avec Israël en acceptant d’éliminer le commando Kidon chargé par l’Etat juif de venger les victimes de Munich, afin de conserver les conditions pétrolières favorable de la part des Etats arabes. Sous le trait hyper-dynamique de Jean-Baptiste Hostache (que je découvre dans un style qui rappelle furieusement le Blain de Quai d’Orsay), l’album est découpé en trois parties à l’intérêt inégal mais aux planches toujours cinématographiques et élégantes.

https://www.actuabd.com/local/cache-vignettes/L720xH990/shib5-0dd23.jpg?1664017879La frustration vient d’une volonté d’intime qui coupe l’action et l’épique chaque fois qu’ils doivent survenir, proposant ainsi un surprenant ton à l’humour très efficace dans un habillage de James Bond. Beaucoup d’attendus seront alors déçus une fois le premier chapitre passé: la critique des barbouseries américaines ou la terrible vengeance du héros invincible laisseront ainsi la place à une séance de spéléologie ou à une soirée décalée dans le château de Hel. Déstabilisant mais pas ennuyeux pour autant, Shibumi se veut comme son personnage: iconoclaste, zen et décalé.

Très bien écrit et porté par des dessins qui font beaucoup au plaisir de lecture et donnent furieusement envie de découvrir les travaux précédents de Hostache, l’album ne donnera en revanche pas forcément envie de lire le roman dont il est issu malgré le très visible « adapté de… » en couverture, hormis pour les curieux. Des difficultés des adaptations qui posent toujours la question du degré de fidélité nécessaire. Shibumi au format BD reste cependant un intéressante surprise qui vous sortira des sentiers battus.

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L’ère des anges

La BD!
BD de Sylvain Runberg et Ma Yi
Delcourt (2023), 77p., one shot. Collection « Les futurs de Liu Cixin » #10.

couv_466775bsic journalismMerci aux éditions Delcourt pour leur fidélité.

Rescapé d’une terrible guerre civile dont le continent africain a le secret, le docteur Ita est aussi l’un des plus brillant scientifique de la planète. Prix nobel de chimie il semble l’exemple d’un modèle américain qui permet aux plus modestes de s’en sortir par l’effort et le talent. Pourtant il décide un jour de se consacrer entièrement à la résolution du problème majeur de la Terre: l’alimentation, au risque de rompre les digues éthiques érigées par la société occidentale. Prêt à tout et sur de son succès, son cas repose la question insoluble: le but, si nécessaire soit-il justifie t’il de s’exonérer de toute morale éthique? Et surtout, qui fixe cette morale?

Les Futurs de Liu Cixin tome 10 - L'Ere des anges - Bubble BD, Comics et  MangasParcourant la collection des Futurs de Liu Cixin par morceaux en sélectionnant (comme souvent) la qualité des dessins, j’entame avec cette ère des Anges (et second scénario de Sylvain Runberg sur la collection) ma quatrième lecture d’une collection qui a le grand mérite de proposer des hypothèses SF parfois très exotiques mais aussi de nous faire découvrir une vision asiatique très différente de notre mode de pensée. Avec les limites du format « nouvelle ». Et clairement ce nouvel album est le plus abouti et satisfaisant de la collection pour le moment.

Avec une technique très BD qui sait remarquablement couvrir les quelques faiblesses de dessin par une mise en scène et une colorisation très élégantes (rehaussées par quelques effets numériques discrets), le chinois Ma Yi nous présente une sorte d’hypothèse anticapitaliste au concept de Wakanda (dans le Black Panther de Marvel). Si on pourra reprocher sa gamme de visage assez réduite, créant parfois des gémellités involontaires, la variété des décors, certains gros-plans et le design général scientifique participent à nous immerger dans le scénario très solide de Sylvain Runberg.

On a pu tiquer sur certaines histoires de Liu Cixin très marquées par une mentalité chinoise centrée sur l’Empire et la dominance du collectif sur l’individu. Ici la finesse et la pertinence du propos sur la domination impérialiste des Etats-Unis y compris en matière de normes scientifiques sont remarquables et passionnantes. Les Futurs de Liu Cixin tome 10 - L'Ere des anges - Bubble BD, Comics et  MangasEn suivant l’itinéraire de ce survivant décidé à tout faire pour résoudre le problème de faim dans le monde on est plus dans un registre d’Anticipation décortiquant le fonctionnement mercantile de notre monde et le texte de Runberg parvient à éviter le piège des méchants cowboy ricains contre les gentils africains en piochant des éléments factuels du pilotage commercial de la diplomatie agressive des USA abordés par des dialogues non manichéens. Ainsi confronté à ses pairs du comité d’éthique de l’ONU, le génie biochimiste nobélisé se voit opposer de vraies questions sur la responsabilité du scientifique dans sa propre limitation. Il rétorque que ces belles valeurs n’ont jamais empêché les drames et famines. Très intelligent, le personnage d’Ita n’oublie pas l’apport financier majeur de ce système qui vend la science mais de par son histoire exige des résultats rapides. Et pour cette fois il sera difficile de voir là une option discutable du régime communiste mais plutôt de vrais questionnements universels que la SF a pour rôle d’aborder.

Doté de belles scènes d’actions, de dialogues très efficaces et de réflexions sur le fonctionnement de notre monde et de l’utilisation jusqu’au-boutiste par les Etats-Unis de leur puissance militaire et d’une morale qu’ils rangent à leurs intérêts commerciaux, L’ère des anges est très proche du coup de cœur et un excellent one-shot de SF.

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***·Cinéma·Comics·East & West·Nouveau !·Service Presse

Batman Le Film 1989

Histoire complète en 60 pages, adaptation du film éponyme de 1989 réalisé par Tim Burton. Dennis O’Neil au scénario, Jerry Ordway au dessin. Parution chez Urban Comics le 10/11/22.

Merci aux éditions Urban pour leur confiance.

Avec le Diable au clair de lune

Vue d’en haut, la ville de Gotham City a tout d’une ville magnificente, une métropole gothique qui porte en elle les germes de la modernité. Mais si vous plongez un peu plus profond, si vous vous risquez à explorer ses entrailles, ses rues sombles et malfamées, vous vous apercevrez qu’elle n’est en réalité qu’un cloaque suintant, une cour des miracles où les gorges se tranchent aussi vite que les réputations se font et se défont.

Bruce Wayne le sait bien. Cette ville l’a vu naître, dans une position privilégiée, mais elle lui a aussi tout pris, lors d’une nuit tragique où ses parents ont trouvé la mort, de façon aussi banale que tragique. Depuis lors, l’orphelin héritier n’a plus montré en public qu’une vaine façade de lui-même, celle d’un play-boy inconséquent dont les quelques accès de prodigalité philanthrope ne visait qu’à soulager sa conscience.

Ce que la ville ignore cependant, c’est que Bruce Wayne n’a pas remisé son traumatisme dans les tréfonds de sa conscience, ni dans les affres d’une vie dissolue, au contraire. Il ne vit désormais plus que pour venger ses parents, et tous les autres parents morts à cause du crime et de la corruption. Poussé par sa soif de vengeance, Bruce a crée le personnage de Batman, un justicier sombre et invincible qui hante les rues de Gotham pour y traquer les criminels. Et il y a de quoi faire à Gotham City…

Durant sa croisade contre le crime, Bruce va faire la rencontre de Jack Napier, un dangereux criminel, dont la psychose explosera au grand jour après sa première rencontre avec Batman. Ce sera le début d’une lutte sans merci entre le héros chauve-souris et celui qui se fait désormais appeller le Joker.

Il est indéniable que le film Batman de 1989, réalisé par Tim Burton, s’est hissé au rang de film culte, un immense succès commercial et culturel de l’époque. Bien que Tim Burton soit revenu depuis sur la hype provoquée par son oeuvre, le film est resté l’une des meilleures adaptations audiovisuelles du personnage (surtout si l’on prend en considération d’autres entrées ultérieures, comme Batman & Robin).

L’adaptation par O’Neil et Ordway, parue à l’époque du film, opte pour la fidélité totale envers le script original. On y retrouve donc l’ensemble des séquences, jusqu’aux dialogues. Graphiquement, Ordway s’inspire bien sûr des fameux décors du film, qui empruntaient à des classiques comme Brazil et Métropolis, et imprime les visages bien connus, et donc bien reconnaissables, des acteurs.

Tout est donc fait pour reproduire l’ambiance et le succès du support audiovisuel. Le récit en lui-même est plutôt condensé, mais les 60 pages du comic sont suivies des 60 pages de crayonné du dessinateur, elles-mêmes agrémentées des recherches préparatoires. Si un cahier graphique est toujours un bonus très appréciable pour une BD, la pertinence de l’ajout de l’intégralité des crayonnés ne me paraît pas si évidente, puisqu’elle double la pagination pour offrir une redite, en V.O., ce qui peut rebuter les lecteurs non anglophones. Le prix de l’album a du aussi en pâtir, ce qui, du point de vue éditorial, peut relever du faux-pas.

Il n’en demeure pas moins que Batman Le Film est une bonne adaptation, certes datée mais qui bénéficie du capital nostalgie dont le métrage jouit encore. La preuve par l’exemple, Michael Keaton est supposé reprendre le rôle dans le prochain film The Flash, qui traitera du Multivers. Côté comics, l’univers créé par Tim Burton a aussi eu droit à une continuation en 2021, avec la mini-série Batman ’89, écrite par Sam Hamm et illustrée par Joe Quinones, pas encore disponible en VF.

*·East & West·Manga

Zombies, Rassemblement ! #1

Premier volume de la série Marvel écrite par Jim Zub et dessinée par Yusaku Kumiyama. Parution initiale en 2015, pulbication en France par Panini Comics le 17 aout 2022.

Zombies au Wasabi

Depuis qu’ils ont sauvé le monde de l’invasion des Chitauri, les Avengers se sont imposés aux yeux des gens comme les protecteurs sans faille de l’Humanité. Iron-Man, Captain America, Hulk, Thor, Black Widow et Hawkeye fêtent donc leur récente victoire, en même temps que l’anniversaire de leur fer-de-lance Tony Stark, lorsque des troubles-fêtes font irruption pour sniper l’ambiance.

Ces rabats-joie ne sont pas des protestataires classiques, car ils portent sur eux toutes les caractéristiques des zombies: peau en putréfaction, sauvagerie extrême et goût prononcé pour la chair humaine. Nos héros se lancent donc sans réfléchir dans la bataille, mais certaines questions doivent d’abord être résolues: d’où vient ce mystérieux virus ? Les innocents infectés peuvent-ils être guéris ? et surtout, comment les Avengers vont-ils pouvoir s’en prémunir ?

Le concept des Marvel Zombies est né en 2006 dans les pages de la série Ultimate Fantastic Four, alors scénarisée par Brian Michael Bendis et Mark Millar, et dessinée par l’excellent Greg Land. Dans les épisodes 21/22/23 de la série, les FF de la Terre 1610 (l’univers Ultimate) font la rencontre de leurs homologues de la Terre 2149, qui se révèlent être des morts-vivants cannibales cherchant un monde neuf afin de renouveller leur garde-manger.

C’est Robert Kirkman et le dessinateur Sean Phillips qui prennet la suite avec le premier volume de la série Marvel Zombies en 2006. On y retrouve un monde dévasté par des super-héros contaminés, qui ont dévoré la quasi-totalité de l’Humanité. Seul Magnéto et une poignée de survivants résistent encore, et empêchent les zombies de quitter cette dimension pour semer la désolation sur d’autres terres. Qu’à celà ne tienne, les zombies dévorent le Surfer d’Argent, ce qui leur permet ensuite de dévorer nul autre que Galactus. Désormais détenteurs du pouvoir cosmique, les zombies se lancent à la poursuite de nourriture à travers tout le cosmos, écumant les galaxies et engloutissant toutes les formes de vie.

Les deux premiers volumes de Marvel Zombies se distinguaient par l’écriture de Robert Kirkman (dont l’oeuvre la plus connue est sans aucun doute la série-fleuve The Walking Dead, aussi sur le thème des zombies). Mais là où TWD misait sur la figure classique du zombie decérébré et titubant, les super-héros morts-vivants de MZ conservaient leurs consciences et leurs identités humaines, tout en étant dominés par une faim insatiable. Cela donnait lieu à des situations mémorables, comme Hank Pym séquestrant T’challa pour le manger par petits morceaux, afin de conserver suffisamment de clarté d’esprit pour trouver un remède, où encore Spider-Man retrouvant sa lucidité après avoir dévoré Tante May et Mary-Jane, où encore la rivalité permanente entre les infectés pour savoir qui aurait le meilleur morceau de barbaque. Petite anecdote sur les origines de la série: la légende veut qu’initialement, Robert Kirkman prévoyait une histoire centrée autour de Luke Cage, héros à la peau indestructible, qui aurait été le dernier survivant, étant par définition immunisé car impossible à mordre. Mais le scénariste aurait du abandonner ses plans après s’être aperçu que Greg Land avait déjà dessiné Cage en zombie dans les pages d’Ultimate Fantastic Four.

Le tout était donc irrevérencieux et cynique tout en étant gore, le ton idéal pour aborder ce genre surexploité. Alors qu’en est-il de ce Zombie Rassemblement, sorte de resucée version manga ?

Le bilan n’est pas fameux, autant vous le dire tout de suite. Le contexte choisi par Jim Zub pour cette version s’apparente clairement au Mavel Cinematic Universe plutôt qu’à celui des comics, ce qui offre une coloration commerciale susceptible de gâcher le plaisir aux fans hardcore. On retrouve donc le casting original du film, ce qui restreint sensiblement la portée du scénario, là où Kirkman convoquait tous les super-héros classiques lors de sa grande boucherie cannibale.

Ce choix correspondait certainement à un cahier des charges imposé par l’éditeur, qui était alors, en 2015, en pleine capitalisation du succès des films Marvel Studios au cinéma. Néanmoins, on est d’entrée de jeu saisi par la différence de ton entre Zombies Rassemblement et Marvel Zombies, puisqu’ici, point d’ironie ni de second degré, et encore moins de carnage. Les héros affrontent quelques hordes de civils infectés, mais sans plus, passant le plus clair du temps au sein de la Tour Stark pour chercher un remède.

La pauvreté en terme de super-héros, tripes & compagnie, est principalement due au postulat de départ, le nombre de personnages disponibles en 2015 étant relativement restreint. On a donc droit à une intrigue plutôt linéaire, avec des dialogues confondants de naïveté et de premier degré.

Cerise éditoriale sur le gâteau de la médiocrité, Panini Comics a, dans sa grande sagesse, jugé opportun de placer l’épisode 0, supposé servir de prologue, après les trois premiers chapitres. Attendez-vous donc à passer du coq à l’âne après le chapitre 3, avec une intro sans intérêt aucun et quasiment vide de sens.

Bilan: Passez votre chemin si vous espériez retrouver une résurgence sanglante des zombies Marvel version ciné. Pour cela, tournez-vous plutôt vers l’épisode 5 de la série animée What If ? qui traite le sujet de façon plus opportune. Pour les amateurs de manga, l’expérience ne nous semble pas non plus indispensable, pas plus qu’aux amateurs du genre zombie en général.

***·BD·Littérature·Nouveau !·Service Presse

Proies et prédateurs

La BD!
BD de JD Morvan, Yang Weilin et Hiroyuki Ooshima (coul.)
Delcourt (2022), 108p., one shot. Collection « Les futurs de Liu Cixin » #6.

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bsic journalismMerci aux éditions Delcourt pour leur fidélité.

La fin du monde est proche. le Dévoreur, gigantesque vaisseau-générationnel de la taille d’une planète arrivera dans un siècle pour absorber les ressources de la Terre. C’est inéluctable. Alertés par un peuple victime de ces destructeurs de mondes et par un émissaire impitoyable, les humains sont résignés à négocier au moins la survie d’un fragment d’humanité. Si ce n’était un officier bien décidé à démontrer que la dernière heure des humains n’est pas venue…

Proies et Prédateurs (Les) (par Jean David Morvan, Hiroyuki Ooshima, YangContinuant à alterner auteurs européens confirmés et fine fleur de la BD chinoise, la collection des Futurs de Liu Cixin parvient à construire une anthologie SF d’une qualité assez remarquable. A la fois modeste par l’adaptation de nouvelles nécessairement condensées dans leur développement et ambitieux par les thèmes abordés par le maître de la SF chinois, ces albums ont le mérite de nous ouvrir à d’autres modes de narration et installent les obsessions et techniques narratives de l’auteur: un déroulé sur un temps très long (plusieurs siècles ici), un traitement hard-science très intéressant, la destruction de la Terre et de l’humanité.

L’adaptation par le chevronné JD Morvan est perturbante en ce que sur cent pages il arrive à installer cette chronique de l’apocalypse sur un temps très long tout en brusquant le récit par des sauts brutaux. Problématique des adaptation, on ne sera pas si c’est la source qui pose problème ou son adaptation (mais le fait que la nouvelle soit plus courte que la BD laisse une idée…). Ce qui est intéressant c’est que les auteurs nous plongent immédiatement dans un récit d’anticipation où l’humanité dispose déjà de vaisseaux spatiaux capables de la projeter dans le système solaire mais se retrouve confrontée à un adversaire dont la taille semble rendre vain tout espoir. Sur la partie la plus intéressante on nous relate le modus operandi des dévoreurs basé sur des explications scientifiques de ce qu’il se produirait sur le plan astro-physique si un corps de taille équivalente à la Terre venait se positionner tout proche. Très vite pourtant débarque sans avertissement cet émissaire d’aspect saurien, parlant la langue universelle et étonnamment kitsch, nous faisant passer en quelques pages de hard-science à un space-opera pulp nihiliste. Morvan n’aide pas beaucoup à ce stade, sur des dialogues parfois très primaires qui nous sortent là aussi du réalisme recherché.

LES FUTURS DE LIU CIXIN - PROIES ET PRÉDATEURS (Jean-David Morvan / Yang  WeiLin) - Delcourt - SanctuaryOn navigue donc tout le long dans cet entre-deux incarné par cet officier stratège que rien ne semble dompter malgré la force infiniment supérieure des envahisseurs et ce dragon vulgaire qui ricane et croque des humains pour l’apéritif. Si le tout sera justifié et expliqué à la fin, rendant l’album très cohérent, on ne peut s’empêcher de regretter ces quelques freins qui empêchent de pleinement savourer un matériau par ailleurs assez passionnant. A l’image de dessins par moment très alléchant mais dotés d’une colorisation très old-school qui les affadissent. Semblant par ailleurs mal à l’aise avec un format batard, les auteurs digressent par moment comme sur ce combat final qui s’étend plus que de raison. Peut-être prisonniers d’un objectif par trop sombre, Morvan et Weilin peinent à donner un sens à cette profusion d’idées parfois lancées de façon trop exposées quand certains enchaînements de planches (comme cette quadruple page décidément à la mode) nous rappellent pourquoi on aime le cinéma de Roland Emmerich.

Proies et prédateurs est ainsi à la fois un des plus solides récits de la collection de par sa démesure et sa profusion de thèmes et un des plus frustrants de par les lacunes narratives de la source ou de l’adaptation. Il reste une lecture SF tout à fait recommandable et un parfait spécimen de l’esprit d’un plus grands auteurs de SF contemporains.

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**·***·****·East & West·Manga·Nouveau !·Service Presse

Blue period #8/9 – La guerre des mondes #3 – Dragonball Super #16

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Salut la compagnie! retour des mangas avec deux belles séries que j’aime suivre chez deux éditeurs toujours qualitatifs. Pas mal de retard sur Blue period qui malgré mon enchaînement de deux tomes commence à voir son intérêt se tasser, à l’inverse de la Guerre des mondes qui m’a procuré un grand plaisir assez inattendu qui confirme le flair de ki-oon pour dénicher des pépites presque à chaque publication. Les aventures de Goku passent elles sans grand intérêt mais sans inquiétude non plus sur un probable rebond dès le mois prochain.

  • Blue period #8 et 9 (Yamaguchi/Pika) – 2022, 208p./volume, 9/12 vol. parus.
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Merci aux éditions Pika pour leur confiance!

 

blue_period_8_pikaVolume 8: ce huitième tome se partage en deux parties. Une première voit Yatora rencontrer un nouveau camarade un peu pot de colle et avec qui le courant ne passe pas vraiment. Le voilà embarqué dans des beuveries un peu contre sa volonté alors que les premières années doivent rendre un travail qui demande à notre peintre de se documenter sur le quartier de Shibuya qui l’avait tant inspiré lors de sa préparation du concours. Par la suite il découvre que les vacances estivales sont destinées à préparer la grande parade de l’Ecole en Septembre, exigeant un énorme travail d’équipe pour réaliser un char de toutes pièces. Si la créativité de ces jeunes artistes est tous les jours impressionnante, l’épuisement guette néanmoins ces passionnés. Tome un peu moins prenant du fait des séquences culturelles sur Tokyo, ses quartiers, sa gastronomie, qui n’intéresseront peut-être moins les lecteurs qui suivent Blue Period avant tout pour l’apprentissage artistique. Heureusement la seconde partie retrouve la fluidité et l’interaction entre personnages qui font tout le charme de cette série depuis le début.

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blue_period_9_pikaVolume 9: on enchaîne sur la fin de la construction du char et la fête qui s’ensuit puis après un épisode de découverte de Velasquez les étudiants entament un travail sur les techniques de la fresque et de la mosaïque. Toujours mal dans ses pompes Yatora navigue entre doute artistique et relations toujours faciles avec ses camarades… hormis avec le très complexe Yotasuke. Ce volume continue ainsi d’explorer les différentes facettes psychologiques du monde de l’art, avec les figures de professeurs parfois très originaux et des questionnements sur le moment où l’on devient un artiste, la différence entre profs et étudiants dans la relation à l’art (des étudiants ne peuvent-ils pas être plus doués que des prof?). L’enchaînement des séquences reste assez brutal et n’aide pas à suivre le cheminement de l’autrice qui par moment semble perdue dans ses pensées et souvenirs d’étudiante en école d’art. Ça reste intéressant et cohérent avec l’état psychologique un peu chaotique de son personnage mais on perd un peu en intérêt didactique.

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    • La guerre des mondes #3 (Yokoshima/Ihata/Wells) – 2022, 192 p./volume, 3/3 volumes parus, série finie.
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Merci aux éditions Ki-oon pour leur confiance!

guerre-des-mondes-3-ki-oonCette très belle série, beaucoup plus ambitieuse qu’il n’y parait, se termine donc sur ce troisième tome qui parvient à accentuer l’intérêt scénaristique alors que la conquête semble passer à un nouveau stade et que le héros découvre la source des terrifiants engins martiens et leur méthode génocidaire. Les deux précédents volumes décrivaient principalement des destructions et la sidération de certains personnages. Un peu moins de scènes de destruction ou de bravoure ici mais le constat de la perte de santé mentale de certains et une avancée certaines dans l’intrigue puisque l’on découvre l’organisation d’une forme de résistance aux martiens. En se basant sur le matériau d’origine les auteurs gardent une certaine contrainte qui explique la brutale conclusion, mais le tout est très intelligemment mené et fait de cette trilogie l’une des versions les plus intéressantes que l’on ait pu lire de ce grand classique de la littérature SF.

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  • Dragonball Super #16 (Toriyama-Toyotaro/Glénat) – 2022, 176 p./volume, 16 volumes parus, série en cours.

bsic journalismMerci aux éditions Glénat pour leur confiance!

dragon_ball_super_16_glenatOn continue sur ce nouvel arc original de la série bientôt quarantenaire (!!!)… qui malheureusement fait retomber les ardeurs perçues sur le quinzième tome. Pendant que Goku s’entraîne avec l’Ange Whis, Vegeta s’entraîne avec Beerus le dieu de la destruction… vous comprendrez comme moi vers quoi on s’oriente, notamment dans l’optique d’une fin possible (quand-même) de la série. L’idée est fort séduisante et aurait l’intérêt de la cohérence après tant de combats contre les plus dangereuses menaces de la Terre/galaxie/Univer(s)…  A côté de cela on nous fait suivre l’itinéraire de ce nouveau personnage « céréalien » qui va se retrouver doté de capacités gigantesques grâce à une des plus grosses feignantises scénaristiques de l’histoire de la saga. Pendant ce temps toujours pas de Freezer à l’horizon et on se demande bien comment Toriyama va se débrouiller pour éviter la redite en annonçant un nouvel affrontement contre « l’armée de Freezer ». Bref, ce tome ne brille vraiment pas par son scénario et n’a ni personnage charismatique ni combat rageur pour nous réveiller. Hormis le jeu avec Beerus et Whis qui fonctionne toujours bien on est donc franchement sur un intermède paresseux.

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***·Cinéma·Comics

Jupiter’s Legacy: la série

Salut à tous!

On commence cette semaine avec un retour sur la série Netflix dont la première saison de huit épisodes est diffusée à partir de mai 2021. Si vous ne savez pas de quoi on parle allez jeter un œil sur l’une des plus enthousiasmantes revisitation du thème superslip depuis Watchmen (si-si!) dont les chroniques des deux albums sont sur le blog (ici et ici). Qui dit deux albums dit deux saisons prévues (et peut-être trois puisque le spin-off en comics Jupiter’s circle développait le passé des super-héros)… qui s’arrêteront au milieu du gué. En effet, de manière assez incompréhensible, moins d’un mois après la mise en ligne de cette série à gros budget adaptée d’un monument BD Netflix annonçait l’annulation du show qui n’aura donc (probablement) jamais de conclusion. Les amis de Comicsblog ont depuis détaillé les raisons, principalement financières et de production, qui ont de fait avorté le projet avant même sa sortie. Un destin tragique mais de moins en moins rare dans les studio hollywoodiens très financiarisés (c’est un comble quand on connaît le thème de Jupiter’s legacy!) où le succès public et critique des créations audiovisuelles ont de moins en moins d’effet sur leurs suites (dernièrement avec la saga Snyder et ses projets chez DC où on rappelle que le mal aimé Dawn of Justice a rapporté 873 millions de dollars dans le monde, ce qui n’a pas suffit pour maintenir Zack Snyder à la baguette).

Alors que sort cette semaine la suite du comics original (et en attendant le second Magic Order dessiné par Immonen!!!) il est temps de revenir sur la version audiovisuel et de vous confirmer à la fois que le visionnage vaut le coup et combien il est dommage que la plus intéressante partie ne nous soit jamais montré (enfin, on fait confiance à Millar et Quitely, producteurs exécutifs, pour relancer la machine si les comics cartonnent). Le premier élément positif porte sur l’adaptation, un véritable travail de réappropriation qui ne se contente pas de transposer les scènes de la BD. Cette première saison alterne en effet deux époques, l’année 1939 qui a mené aux super-pouvoirs des personnages et notre époque où le code moral de l’Union est battu en brèche par l’évolution de la violence. Si la famille dysfonctionnelle d’Utopian est présentée, le cœur du show repose sur la jeunesse des premiers héros, dans une esthétique rétro très élégante et qui permet aux acteurs de montrer leur talent. Sans grosse tête d’affiche (économie pertinente), Jupiter’s legacy permet aux acteurs de s’exprimer avec charisme et sans le ridicule (il faut le dire) des perruques et costumes de l’autre époque.

Les lecteurs de la BD ne s’ennuieront donc aucunement puisque c’est une histoire presque originale qui nous est narrée (du moins placée entre les évènements du comic), en repoussant à la saison deux toute la partie politique et « occupy wallstreet » qui faisait le sel si radical du projet. C’est intelligent car cela permet de rester grand public tout en permettant la bascule entre deux parties. D’où la frustration, partiellement compensée par l’aspect origin story qui nous fait comprendre comment les originels se sont rendus sur l’Ile (pour rappel une énorme ellipse les y envoyait chez Millar et Quitely). La surprenante folie d’Utopian permet aussi d’expliquer sa morale d’airain sur le Code (qui renvoie bien entendu au Comic code Authority des comics que Millar a largement mis à terre dans son œuvre) et décortique un peu plus l’amitié très forte avec le futur Skyfox.

Clairement la partie contemporaine, outre des look assez kitsch pour les héros, est la plus faible et semble bouche-trou puisqu’il n’est pas vraiment prévu que le scénario ne se révèle avant la saison suivante. Étant donné l’historique de ce show il est donc préférable de prendre ce visionnage comme un bonus servant de prequelle à la BD et qui peut presque se suffire à lui-même de cette manière. Comme je l’ai dit, les acteurs sont vraiment impliqués et plutôt bons (avec notamment un excellent Walter Sampson avec des airs de Tom Hiddleston), quelques belles séquences de combat et d’effets spéciaux sont proposés et la mise en scène est tout sauf honteuse en regard de ce qui se fait sur Netflix. Les stat de visionnages avaient d’ailleurs confirmé une plutôt bonne accroche pour un budget certes conséquent mais moindre que Stranger things ou The Witcher (dont les retours sont plutôt moyens). Bref, encore un bien beau gâchis créatif qui montre combien la gestion de la production est souvent plus importante que le talent créatif ou l’originalité d’un projet.

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