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Joe Shuster, un rêve américain

Le Docu du Week-End

 

Roman graphique de Julian Voloj et Thomas Campi
Urban (2018), 184 pages, one shot.

bsic journalism

joe-shusterL’album comprend 158 planches, une préface, une post-face du scénariste expliquant le projet et une vingtaine de pages de références et citations de différentes cases de l’album. Il s’agit d’un véritable roman graphique qui n’est pas lié à l’éditeur DC mais lancé par Julian Voloj  qui a recruté l’italien Thomas Campi pour l’occasion. La dimension documentaire est évidente et c’est ce qui rend l’album passionnant, avec la post-face qui détaille l’enquête du scénariste et l’aspect très documenté du livre. L’ouvrage a été lu en numérique, je ne peux donc commenter la fabrication par l’éditeur français Urban.

Deux jeunes américains installés avec leurs familles à Cleveland vont inventer un mythe en même temps qu’un genre éditorial dont la popularité est aujourd’hui mondiale: Superman et les super-héros! Le récit est fait au travers du dessinateur, jeune juif dont la famille a émigré récemment au Canada et qui rêve de faire de la BD. On apprend comment son ami Jerry Siegel invente Superman et son histoire, comment ils parviennent dans un premier temps à vivre de leur création avant de constater qu’ils se sont fait manipuler par un éditeur cupide qui les laissa ensuite dans une quasi-misère!…

Résultat de recherche d'images pour "joe shuster campi"Comme souvent c’est le graphisme qui m’a fait venir à cet album improbable, et c’est l’histoire qui m’a passionné! Une histoire humaine, les auteurs derrière le mythe. La chronique d’une époque, l’Amérique des années 30-40, le monde de l’édition de comics de l’intérieur, où l’on croise certains Stan Lee ou Bob Kane, où l’on apprend mille détails peu connus sur la réalité de ces héros de l’imaginaire (comme après exemple le fait que Bob Kane co-créa Batman en s’accaparant toute la gloire, auteur qui avait les pieds sur terre et que le dessinateur Campi n’hésite pas à comparer à son Joker…). C’est une histoire dramatique que l’on lit. Après les premières années de jeunes rêveurs, très vite la réalité des froids capitalistes les rattrape et les écrase: on leur vole leur création par un contrat trop vite signé, qui cède l’intégralité de la propriété du personnage à l’éditeur, de façon perpétuelle! De jeunes naïfs ont commis l’erreur de leur vie et alors que le créateur de Batman et d’autres auteurs aujourd’hui réputés deviennent rapidement très riches, eux passent une vie de rigueur, Siegel hanté par ce vol et Shuster rattrapé par des problèmes de santé et de vue. Ce n’est finalement que grâce à la sortie du film de Richard Donner et de l’argent que le studio Warner s’apprêtait à engranger que les deux auteurs sont finalement reconnus comme les créateurs de Superman et mis hors du besoin, à soixante ans passés… Une histoire incroyable que personnellement je ne connaissais absolument pas et qui donne beaucoup de précisions sur le fonctionnement d’un monde éditorial qui n’a sans doute pas tellement changé de l’autre côté de l’Atlantique. La question du droit d’auteur est essentielle et la situation chez l’Oncle Sam explique la fréquence des rappels des auteurs des personnages, chose moins courante chez nous.

Résultat de recherche d'images pour "joe shuster campi"Côté dessins Campi aborde deux techniques entre le récit de Shuster et l’époque récente. Le scénariste souhaitait représenter la vieille Amérique de l’Age d’Or dans un graphisme proche des tableaux de Hopper et son dessinateur y parvient parfaitement en offrant des planches très belles, colorées et esthétiques. L’élégance très rétro nous immerge dans une époque utopique où les valeurs semblaient simples et raccord avec l’idéal d’auteurs perdus dans leurs imaginaires. Résultat de recherche d'images pour "joe shuster campi"L’album nous montre aussi beaucoup de références qui ont permis d’aboutir à Clark Kent ou à Superman: Harold Loyd, les immeubles de l’époque, Moïse et les BD pulp de science fiction de l’époque… mais aussi des planches originales très rares des autres créations du duo.

L’album est gros mais se lit d’une traite, passionnant de bout en bout en nous présentant autant la démarche créative, l’amitié de deux gamins des années 30, le marché du comics et l’argent qu’il génère… on a le sentiment d’avoir absorbé une histoire du comic américain aussi facilement que le visionnage d’un documentaire animalier. Le travail de Julian Voloj a du être très conséquent et accouche d’un grand album que je vous invite très vivement à vous procurer, que vous soyez amateur de comics ou non.

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