BD de Yann et Romain Hugault
Paquet (2014-2017), 1° cycle de 3 volume (46 planches/album) paru. Une intégrale et les albums grand format disponibles.
J’ai eu sous la main les albums au format normal, mais d’expérience l’éditeur Paquet fait du bon travail sur les grands formats. En outre les larges cases utilisées par Hugault pour ses magistrales séquences d’aviation méritent le détour en grand format. L’édition normale comporte une petite bio d’un vrai aviateur des Burma Banshees et toujours de très sympa plans d’avions et des pin-up dans les intérieurs de couverture. Cette chronique porte sur le premier cycle de la série, clôturé. Un second cycle se déroulant dans le Pacifique a commencé en 2017.
En 1944 sur le front asiatique, l’empire japonais menace la Chine et l’Inde. Une aviatrice chevronnée, civile membre des Women Airforce Service Pilot (Wasp) assure des navettes entre des bases isolées et occupées par de rudes pilotes de chasse. Dans ce monde d’hommes, dans une armée qui cantonne les femmes au rôle de secrétaires en talons, c’est toute une époque que nous découvrons au travers des aventures d’Angela…
Avec les aventures de cette forte femme, Yann et Hugault nous plongent dans les soubresauts de cette guerre, entre sabotages, missions de sauvetage de pilotes éjectés et attaques ennemies. Pour ceux qui ne connaissent pas, Romain Hugault est un superbe dessinateur passionné d’aviation et pilote hors de la planche à dessin. Il est ainsi le chef de file d’une école de BD d’aviation et à moins que vous ne soyez allergiques à ce qui à des ailes et des hélices, il faut dire que l’ensemble de ses albums regorge d’illustrations de voltige et de batailles aériennes absolument magistrales de virtuosité et de précision documentaire. Il faut voir le dessin de chaque vis et rivet pour imaginer le travail de documentation et la passion du détail qui anime l’illustrateur.
J’ai découvert Hugault sur son premier album et premier succès, le Dernier envol, recueil de quatre histoires, de quatre vies liées aux avions, pendant la seconde guerre mondiale. Si cette période occupe la quasi-totalité de son œuvre (hormis une escapade sur la première guerre mondiale dans Le pilote à l’Edelweiss) ce n’est pas uniquement par-ce qu’elle lui permet de dessiner des avions de guerre mais bien par-ce que les années 1940 le fascinent. Dans Angel wings plus que dans ses autres séries, le scénario de Yann insiste particulièrement sur le sort réservé aux femmes dans une Amérique machiste, qui plus est lorsqu’elle est en guerre. Cette BD que l’on pourrait presque qualifier de féministe a l’intelligence de ne pas être anachronique comme le sont souvent les histoires contestant une situation historique. Angela est révoltée bien sur, mais femme de son époque, elle accepte en partie sa condition qui ne changera que dans le regard que lui portent les hommes de la base en constatant son courage.
L’on en sait très peu sur cette étrange aviatrice sachant se battre, manier un fusil et survivre dans la jungle birmane, qui est étonnamment assez peu présente dans les cases hormis dans la trame générale du scénario qui semble tourner autour du décès de sa sœur, aviatrice comme elle. Et pour cause, il faut le reconnaître, l’histoire est assez anecdotique et plus un prétexte à illustrer des séquences d’aviation via le personnage du pilote de chasse Rob, des paysages et des séquences de bataille. C’est la recette de tous les albums de ce dessinateur (ses autres séries sont peut-être un peu plus consistantes), mais cela n’en fait pas moins de magnifiques BD bien au-dessus de la moyenne des albums grand-public historiques.
A la documentation visuelle de l’illustrateur répond une précision historique concernant une foule de détails sur les bases militaires en Asie, le quotidien d’un soldat sur le Front oriental ou la politique de déstabilisation radio du Japon (méthode certainement coutumière de tous les régimes en période de guerre mais saisissante ici: insidieusement on insinue que les médicaments donnés par l’armée US rendent impuissants, que les femmes restées au pays trompent les soldats, etc)… Je disais que l’histoire était un décors. Cela n’est pas une critique: la force de ces albums est documentaire et sur ce point c’est une grande réussite. Personnellement j’ai moins apprécié ce décors birman que les précédents albums du tandem Yann-Hugault en Europe, mais cela reste passionnant de réalisme, que ce soit les dialogues, les poses, les coiffures, on sent l’envie de cartes postales les plus précises et on apprend plein de choses. Bien sur on reste du côté hollywoodien, c’est clair, coloré, plein de bons mots. Cela n’empêche pas des drames, mais la dureté de la guerre reste au loin, comme dans l’esprit d’un aviateur perché sur son aigle d’acier au-dessus des combats.
Pour résumer, si vous aimez les avions, les belles images colorisées au numérique, la précision historique, les femmes (côté émancipation et côté rondeurs…), les années 40… foncez, au risque de découvrir un auteur que vous ne pourrez plus lâcher.
Je ne pense pas que ce soit pour moi mais je le feuilletterai bien au cas où !
J’aimeJ’aime
Pour moi, c’est indéniablement la meilleure série de Romain Hugault, avec un « Yann » inspiré.
J’aimeAimé par 1 personne
Bon ben du coup on diverge… mais entre du très bon et de l’excellent… 😉
J’aimeJ’aime
Un sujet sur lequel je ne connais rien… Je note, pour un passage en bibliothèque.
J’aimeAimé par 1 personne
Surtout que Hugault est assez présent en bibliothèque (surement le côté historique qui plait aux bibliothécaires 🙂
J’aimeJ’aime
Pas du tout mon truc cet univers, même si je me rappelle de l’incroyable succès du dernier envol au moment de sa parution.
J’aimeAimé par 1 personne
Les dessins semblent très beaux !!!
J’aimeAimé par 1 personne
Oui, j,adore. Et les séquences d’aviation sont à tomber tant sur le cadrage que sur la précision!
J’aimeJ’aime
Pas certaine d’adhérer pour ma part… à voir…
J’aimeJ’aime
[Argument commercial] et si je dis que c’est une femme forte, féministe qui fait la nique à une armée de macho… 🙂
J’aimeJ’aime
Brize oups !
J’aimeJ’aime
Hum, à voir ! Comme Briez j’avais un peu peur des stéréotypes du dessin …
J’aimeAimé par 1 personne
C’est une esthétique générale années 40-50 aux états-unis que l’on voit dans pas mal de films par exemple. Cheveux gominés, pin-ups au fort caractère et héroïsme. Y’a une part de réalité là-dedans et une part d’image d’épinal que les auteurs assument très bien. Mais si tu aimes les dessins et les avions bien dessinés, ca vaut le coup de découvrir cet auteur.
J’aimeJ’aime
Cela fait un moment que j’ai repéré cette série, qui me tentait bien, mais le fait que l’héroïne soit représentée en mode pin-up m’arrêtait, j’avais malgré tout peur des stéréotypes. Je vois que ce n’est pas le cas (mais je note l’histoire manquant un peu de consistance, donc je vais aussi aller fureter du côté des autres albums que tu évoques). Merci pour ce billet très documenté, en tout cas !
J’aimeAimé par 1 personne
Perso j’adore le premier album, one shot, « le dernier envol » et « le pilote à l’edelweiss » (2 vol), très original sur l’époque années folles, l’histoire de deux frères jumeaux. Egalement « Au dela des nuages » (2 vol) sur une concurrence romantico-aérienne dans les années 40. Perso ANgel wings est celui auquel j’ai le moins accroché, mais c’est vraiment lié à l’esthétique du lieu géographique (et il y a un peu moins de combats aériens aussi). Mais comme la série continue sur d’autres cycles avec un développement de l’action d’espionnage de l’héroïne ca peut changer les choses.
J’aimeAimé par 1 personne
Pas pour moi mais pour mon papa, je note, merci!
J’aimeAimé par 1 personne
De rien
J’aimeJ’aime
J’ai bien envie d’y jeter un oeil, et peut être même deux! Merci pour la découverte!
J’aimeAimé par 1 personne
Le billet porte sur la dernière série en cours mais je voulais surtout vous faire découvrir un auteur que je trouve vraiment intéressant et son duo avec le scénariste est très bien aussi. Ca vaut le coup de regarder toutes ses séries (max 3 volumes par série) pour trouver l’époque et l’histoire qui te plait le plus, mais la recette reste la même et hormis Le pilote à l’edelweiss, toutes se déroulent pendant la seconde guerre mondiale.
J’aimeJ’aime
Cela peut se tenter !
J’aimeAimé par 1 personne