BD de Bastien Vivès
Casterman (2008), 135p., one-shot.
Le sport ce n’est pas trop son truc, pourtant avec sa scoliose lorsque son kiné lui dit d’aller faire de la natation, il s’exécute. Dans ce temple aquatique il découvre un univers de silence, d’anonymes, d’ombres étranges. Lorsqu’elle surgit de l’eau telle une sirène gracieuse il se retrouve fasciné…
Bastien Vivès est un étrange auteur qui parvient à faire une jonction entre la « haute BD » celle des sélections d’Angoulême, des revues littéraires et de Télérama et de la BD populaire qui lorgne vers le Manga et le comics avec Lastman par exemple. Celui qui a récemment repris Corto Maltese publiait donc en 2008 sa troisième BD dont on sent (comme pour son comparse Sanlaville) ce très doux album quasi muet, contemplatif, qui nous décrit l’immersion d’un naïf dans le monde aquatique des piscines publiques et l’amour naissant, pudique, pour une nageuse qu’il croise lors de ses séances. Très fortement influencé par l’Animation, Vivès joue sur les formes, les perspectives brisées par la nappe aqueuse, nous faisant presque ressentir le piquement du chlore et le brouhaha étouffé du lieu que nous connaissons tous.
Outre une technique déjà impressionnante dans son style minimaliste, c’est la force de l’évocation qui marque à la lecture rapide de cet album. Chaque image est juste, nous parle de nos heures de piscines, d’un lieu où chacun partage les mêmes moments, parfois étranges lorsque sous la douche des gens de toutes formes vous regardent dans votre uniforme synthétique. A cela s’ajoute dans la deuxième partie ce touchant sentiment amoureux d’un garçon pas à l’aise et qui n’ose exprimer ses sentiments.
Marqué par de longues observations et beaucoup de très beaux moments, Le goût du chlore est un feelgood album qui rappelle les petites choses et la puissance de l’observation de ces artistes dont on attend souvent beaucoup et qui parfois nous offrent de si petites mais jolies choses.