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Big Under #1: Catacombes

Premier tome de 128 pages du dyptique écrite par Virgil Iscan et dessiné par Alex Nieto. Parution aux éditions 404 Comics le 26/01/2023.

En-dessous de tout

En 1774, le sol de la Rue d’Enfer à Paris s’effondre, engloutissant un pâté entier de maisons par trente mètres de fond. Cette tragédie conduit le roi Louis XVI à créer l’Inspection Générale des Carrières, chargée de surveiller l’évolution des sous-sols de Paris, connus pour la présence de profondes catacombes, qui ont transformé les sous-sols en gruyère.

De nos jours, la ville continue son fourmillement sans trop se soucier de ce qui grouille, tapi dans ses profondeurs. L’IGC existe toujours, et veille de façon quasi-anonyme sur les sous-sols. Ses membres expérimentés, quoiqu’un peu désabusés, sont soudain préoccupés par deux effondrements successifs, qui ont fait remonter à la surface des ossements pour le moins étranges. Mais il semblerait que le directeur, Pierre-Guillaume, veuille laisser un voile sur ces événements afin de ne pas laisser filtrer la nouvelle, au grand dam de son équipe qui sent poindre une catastrophe imminente.

Raison de plus de s’inquiéter, Sophie, la fille de Pierre-Guillaume, ne vient plus au lycée depuis plusieurs jours. Son amie Sonia semble pourtant être la seule à s’en inquiéter. Têtue comme une mule, Sonia va embarquer, un peu malgré eux, son groupe d’amis, Dez, Berry et Kim, sur la piste de Sophie. Leur enquête va les mener à une conspiration tentaculaire prenant racine dans les entrailles creusées de Paris. Que cache le directeur à ses subordonnées ? Qu’a-t-il fait de sa fille ? Nos héros adolescents ne vont pas tarder à le découvrir, à leurs dépens.

Big Under vient enrichir le catalogue des éditions 404 Comics, dont plusieurs albums ont déjà été chroniqués ici (Zombie World, Mundus, We Live, Jonna, ou encore Big Girls). D’emblée, on est intrigué, voire happé, par le pitch énigmatique en quatrième de couverture: « Paris est condamnée, les catacombes sont la clé« . Nous sommes donc partis pour une exploration des mystères de Paris, dont les catacombes ont toujours défié l’imagination des curieux.

A première vue, l’intrigue se repose sur une structure bien connue, et qui a fait ses preuves, à savoir celle du groupe d’ados outsiders qui part à la recherche d’un ami disparu. Si vous avez une vague connaissance de la pop culture récente, alors cette prémisse devrait vous rappeler les débuts d’une série avec plein de Choses Étranges. Mais la comparaison s’arrête ici, puisque comme vous le savez, l’exception française finit toujours par s’appliquer. Le scénariste Virgile Iscan nous embarque joyeusement grâce à ses personnages attachants, ados que l’on croirait tout droit sortis du lycée en face de chez vous. L’auteur utilise l’oralité urbaine d’aujourd’hui pour crédibiliser ses protagonistes, quitte à risquer le jeunisme parfois un peu décalé. Mais celà n’enlève rien au déroulement de l’intrigue ni à ses enjeux, que l’on continue à suivre sans temps morts ni décrochage.

L’auteur parvient à maintenir le suspense jusqu’à la dernière page, faisant montrer crescendo la tension dramatique sur ce premier tome. Sur la base de deux enquêtes parallèles, celles des agents de l’IGC façon Ghost-Busters et celle de Sonia et sa bande, le mystère ne fait que s’épaissir, malgré la volonté des protagonistes de trouver la vérité. On sent ça et là des influences comme Mike Mignola / John Arcudi, que l’auteur utilise à bon escient sans que cela soit pour autant cousu de fil blanc.

La partie graphique assurée par Alex Nieto est qualitative. L’artiste opte pour un trait simple et sans fioriture, mais on aurait aimé un accent plus prononcé sur les décors urbains, la ville de Paris étant ici partie prenante. Hormis sur quelques cases, on peut reprocher un manque de spécificité à l’architecture urbaine. Celà dit, le dessinateur espagnol gère très bien son découpage ainsi que les passages plus dynamiques, et que dire des mon- oups, on ne spoile pas !

Big Under débute très bien son lancement, avec une intrigue prenante, des personnages crédibles et un dessin de qualité. On attend la suite, évidemment !

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Kong Crew #2 – Blacksad #6

Pour finir la semaine on continue dans le registre années 50 ouvert par le Noir Burlesque de Marini mercredi et fort bien accompagné par deux excellentes séries, le désormais patrimonial Blacksad qui revient en grande forme et le run Pulp d’Eric Herenguel Kong Crew. Enjoy!

  • Kong Crew #2: Hudson Megalodon (Herenguel/Ankama) – 2021, 2 volumes parus.

bsic journalismMerci aux éditions Ankama pour leur fidélité.

couv_435691Comme pour le précédent volume Ankama et Herenguel ont peaufiné une très belle édition qui met dans d’excellentes dispositions pour continuer la lecture de cette pulpissime série. Pas de bonus particulier hormis deux couvertures alternatives (plutôt mieux que celle retenue pour l’album). Eric Herenguel aime les dinos et vous comme le montre l’illustration, vous allez en avoir pour votre argent! Retrouvez la critique du premier volume (en format comics) ici.

Après ce qui ressemblait plus à une introduction dans le premier tome, on rentre en plein dans l’action en retrouvant Virgil aux prises avec la reine des Amazones. Alors qu’un commando spécial est envoyé dans la Jungle de Manhattan et proprement décimé en mode survival la fille du colonel lance un plan pour sauver le chien-héros… On reste donc proche du n’importe quoi avec un sens diablement élevé du cadrage cinématographique de la part d’Eric Herenguel qui confirme que Kong est un gros décors scénarisé présent par des surgissements épisodiques pour laisser planer une menace gigantesque. Les personnages ont pourtant affaire principalement aux dinos bien méchants et on peut dire que comme dans les modèles du septième Art (on pense à Predator ou aux Jurassic Park) ça meurt beaucoup à Manhattan! L’histoire avance bien dans un scénario très bien huilé qui distille les infos régulièrement sur des protagonistes qui avaient été survolés jusqu’ici. Qui est bon, qui est méchant? Hormis les passages avec la fille du colonel qui ont vocation à maintenir de l’humour dans cette grande aventure mais qui ne sont pas franchement passionnants, on est tout à fait pris dans ce superbe blockbuster, fantasme géant miraculeusement sorti de l’imaginaire d’Herenguel. On en redemande!

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  • Blacksad #6: Alors tout tombe (Canales-Guarnido/Dargaud) – 2021, Première partie d’une histoire en deux volumes.

couv_431431Cela faisait huit ans que nous n’avions plus de nouvelles du ténébreux détective John Blacksad! Prenant leur temps pour développer de très profondes chroniques de l’Amérique des années cinquante, Guarnido et Canales se lancent pour la première fois dans un diptyque qui, surprise, se trouve lié avec le troisième tome Ame Rouge, le meilleur de la série selon moi. Plus passif, le détective se retrouve engagé comme garde du corps d’un syndicaliste qui dérange les projets immobiliers du maire de New-York et son éminence grise, jamais à cours d’un mauvais coup. Entre un milieu intellectuel autour duquel gravite Blacksad et les enquêtes journalistiques de Weekly et sa nouvelle copine, les planches de Guarnido claquent toujours autant et montrent que le dessinateur espagnol n’a rien perdu de sa passion pour le mouvement et le détail. Comme d’habitude l’enquête du héros est prétexte à aborder mille et une facette de cette société florissante d’un pays tiraillé entre utopie intellectuelle et pouvoir fascisant. Entre ces deux veille le chat et ses neuf vies…

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****·BD·Mercredi BD·Nouveau !·Service Presse

Bring the kids home

BD du mercredi
Freak’s Squeele : Funerailles #5
BD de Florent Maudoux
Ankama (2018), 78p. 5 volumes parus.

bsic journalismMerci aux éditions Ankama pour leur confiance.

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Rien de particulier niveau édition pour ce tome qui ne comporte aucun bonus contrairement à ses prédécesseurs. A mesure que l’histoire se recentre sur Mammouth les couvertures lui font la part belle, en gardant toujours la structure ternaire des trois personnages.

La XIII° Légion renégate de la République de Rem a survécu et se repose dans la cité d’Urkesh dont l’Archonte lui a offert la protection en échange de la sécurité. Jusqu’à ce qu’apparaissent les chevaliers d’Isis, une déesse ancienne aux pouvoirs incommensurables. Plongés dans le chaos les nouveaux Méta-guerriers vont tenter d’éliminer la menace…

La structure de cet album est étonnamment simple: après le repos, le combat, auquel Bring the kids home fait la part belle entre deux blagues de bidasse dont Mammouth a le secret et la finesse… La transition entre le T4 et le T5 est un peu étrange en ce que le précédent se conclut sur la vision de la procession d’Isis et que le suivant reprends semble-t’il plusieurs semaines plus tard avec des personnages qui semblent découvrir cette menace. Résultat de recherche d'images pour "maudoux funerailles bring the kids"Passons. Ce volume permet à Florent Maudoux de se régaler dans des dessins architecturaux de type fantasy que l’on avait déjà vus sur la série mère mais peu sur Funerailles. Le plan de la cité est suivi très précisément, ce qui est rare en BD et l’on surprend des scènes situées dans un même plan à différents moments de l’album. J’aime beaucoup cette idée. Les cités grandioses, leur vie et leurs habitants insufflent toujours une grande force d’imaginaire dans ce genre de récits.

Le thème de l’album porte sur l’oisiveté, nocive pour des soldats habitués à l’action mais surtout permet à l’auteur de se livrer à une grosse bataille à la Chevaliers du Zodiaque (son grand dada sur cette série, vous l’aurez compris) avec des méchants plutôt réussis et une radicalité bien pensée dans le déroulé de l’affrontement et les choix des protagonistes. Je l’ai déjà dit, Maudoux est un auteur qui se fait plaisir, assume l’insertion de thèmes pas forcément grand public et de références visuelles non digérées. C’est ce qui rend intéressante cette série de par l’impression d’entrer directement, sans filtre, dans l’imaginaire de quelqu’un de grand talent.

Résultat de recherche d'images pour "maudoux funerailles bring the kids"Visuellement les scènes de combat en armure, en noir et blanc tramé comme on en a désormais l’habitude, ne sont pas forcément toujours très clairs de par l’utilisation peut-être un peu abusive des reflets qui rendent les armures/personnages pas toujours compréhensibles. De ce fait les séquences en couleur sont beaucoup plus lisible. Personnellement j’adore les dessins très encrés et si visuellement cela reste magnifique et assez virtuose, la lisibilité en pâtit un peu.

Ce tome est dans la continuité des autres niveau qualité (très bon), mais ne parvient pas vraiment à nous surprendre (on est déjà au cinquième épisode de la série, le renouvellement commence à être compliqué), notamment avec une mise de côté des tenants diplomatico-militaires (l’esprit police-politique du début du volume est rapidement et étrangement délaissé alors qu’il introduisait une complexité morale). On ressent d’autant plus l’intelligence de la respiration du tome précédent malgré une évolution des personnages (inversion des rôles entre Mammouth et Scipio et… toujours Funerailles en retrait). Le lecteur passera néanmoins un excellent moment, plus grand public, en croisant les doigts que le prochain volume ne marque pas un essoufflement de la série.

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