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Special Ryoichi Ikegami: Sanctuary #2 – Trillion game #2

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Le festival d’Angoulême a mis à l’honneur cette année l’immense Ryoichi Ikegami, auteur phare des années 90 et 2000 qui revient avec une excellente série écrite par le scénariste de Dr. Stone. Je profite de l’occasion pour chroniquer les derniers volumes de cette série et de la réedition en Perfect de sa série majeure, Sanctuary.

bsic journalismMerci aux éditions Glénat pour leur confiance.

  • Sanctuary #2 (Buronson-Ikegami) – 2022 (1990), 208p., 3/14 tomes parus.

sanctuary_2_perfect_glenatAlors qu’Hojo est parvenu à la tête du clan Yakuza, Asami se trouve ostracisé de la sphère politique suite à sa trahison. Pendant que l’un doit rompre les digues des alliances pour enclencher la révolution générationnelle son ami politicien parvient à réunir autour de lui la jeune garde politique, attirée par ses promesses de changement…

Ce n’est que le tome deux de la série mafieuse de Ryochi Ikegami mais on note déjà que les rôles féminins sont au mieux dans l’ombre mais plus problématique, qu’elles sont cantonnées à des fantasmes sexuels ou objets pour ces messieurs. Bien sur on se situe dans un univers au machisme absolu et ce n’est pas aberrant mais on espère voir se développer le personnage de la commissaire qui reste sur tout ce tome un pot de fleur… Comme sur le précédent volume l’intrigue avance vite à force de coups d’éclat, la trogne d’ange d’Hojo agace et le fauve Tokai semble bien amuser les auteurs qui développent ses séquences comme celles d’un chien de guerre à utiliser à bon escient pour dynamiser une narration faite de manigances permanentes. La multiplicité des intrigues permet de les entrecroiser et d’ajouter du rythme et de la complexité quand la galerie de personnages toujours en croissance permet de décentrer le récit du seul duo héroïque, créant un équilibre remarquable. Si l’on accepte l’aspect vieillissant (sur lequel on remarque néanmoins un dessin plus détaillé que dans sa dernière série ci-dessous) l’ensemble est dans la catégorie des excellents manga qui marquent les époques. Vite la suite!

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    • Trillion Game #2 (Inagaki-Ikegami) – 2023, 208., 2/5 tomes parus.

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Haru et Gaku sont lancés dans le concours de hacking en utilisant toujours la méthode qui semble leur sourire: une alliance de talent brut et de toupet sans limite. Si cela leur attire des inimitiés, les appétits sont également alléchés par une détermination que certains voient comme la plus grande qualité pour monter une start-up. Mais l’absence de règles de Haru suffira t’elle à les insérer dans le monde de la finance?

Dans Trillion game on est (comme avec Dr. Stone) toujours à la limite du grand n’importe quoi… Le choix assumé de la farce et le talent de Riichiro Inagaki à créer des mécanismes nous font pourtant oublier l’absurdité des séquences en s’appuyant sur une constante: dans le monde de l’argent les plus gonflés sont les plus forts. Bien qu’ils s’abstiennent de poser une morale à leur manga dans l’idée de conserver un aspect grand-public, les auteurs restent cependant cohérents avec une dynamique de start-up qui veut que les puissants recherchent en permanence de jeunes pousses pour alimenter le système. Paradoxalement c’est le dessin d’Ikegami qui paraît le plus faible dans ce second tome, avec bien sur une qualité globale impressionnante mais des visages copier-collé qui se différencient par les seules coiffures. On sent la rapidité d’exécution où le maître reste en dessous de l’orfèvrerie de ses vieilles séries comme Sanctuary. Heureusement que les assistants font le job sur un canon très qualitatif pour proposer un excellent remplaçant aux aventures de Senku qui s’approchent de leur fin…

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Special Ki-oon: Alpi #7 – Clevatess #3 – Tsugumi #5

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Salut les mangavores! (encore) un gros retard côté manga qui me permet de proposer aujourd’hui un billet spécial Ki-oon, un de mes éditeurs préférés qui ne sort pas que des cartons (le récent Lost Lad London m’a franchement laissé sur ma faim) mais dont la stratégie du peu mais bien leur permet autant de dénicher des pépites que tout simplement lancer des manga originaux qui confirment le statut de troisième marché au monde pour l’édition française de manga.

bsic journalismMerci aux éditions Ki-oon pour leur confiance.

  • Alpi the soul Sender #7 (Rona/Ki-oon) – 2022 (2019), 208p., série finie en 7 volumes.

alpi_the_soul_sender_7_kioonOn touche au but de cette très jolie série qui aura simplement péché par manque d’expérience et de construction d’une intrigue qui n’aura débuté que tardivement. Cet ultime épisode prend la forme d’une attaque finale sur le temple des soulsenders en mode Kaiju. La gestion de l’action manque parfois de lisibilité dans le mouvement mais l’ensemble reste très agréable et notamment sur les points forts du manga, les dessins des décors et des costumes. L’autrice a le mérite de refermer (un peu rapidement) les intrigues de fond (notamment l’histoire des parents) sans hésiter à aller dans le dramatique. Le volume en tant que tel est très honnête et l’on sent un vrai effort pour achever correctement le manga. Pour une première œuvre publiée en ligne on ne tiendra donc pas rigueur à Rona pour cette ambition modérée et cette progression au fil de l’eau. Alpi th soulsender restera une très belle lecture relativement courte, pas la plus impressionnante du catalogue Ki-oon mais très recommandable.

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    • Clevatess #3 (Iwahara/Ki-oon) – 2022 (2020), 224p., 3/5 tomes parus.

clevatess_3_kioonToujours très axé action ce volume voit Alicia lutter contre le redoutable chef des sorciers entouré d’une nuée d’insectes. L’absence de Clevatess (parti affronter l’armée de l’envahisseur Dorel) permet au personnage de l’héroïne de se développer en la sortant du contexte d’outil aux mains du démon qui prévalait depuis le premier volume. En parallèle se déroule la bataille à grande échelle entre les deux armées et la réaction de la princesse de Hiden lorsque la rumeur concernant la survie de l’enfant héritier du pouvoir des Hiden survient.

Ce qui est intéressant dans cette série c’est la constance de l’auteur à essayer de renverser les canons de la fantasy en questionnant ce qui est habituellement acquis. Ici la position des héros est rattachée par le peuple à celle de la noblesse d’Ancien Régime qui revendiquait une gloire de principe alors que la plèbe toute attachée à sa survie ne faisait que constater les effets des guerres sur leur quotidien. En rappelant ainsi que le nationalisme monarchique (ou héroïque) fut souvent imposé, le mangaka dresse une véritable analyse politique dans ce cadre dark-fantasy, qui apporte un vent de fraîcheur au-delà du retournement initial du récit fantasy qui voit le mal gagner. On avait compris jusqu’ici une problématique des liens entre humains et rois-démons (qui assument un rôle similaire aux rois des animaux ou Gaïa dans les récits écologiques type Miyazaki) pas aussi binaire qu’attendue et nous voici questionné au sein d’un monde humain qui aussitôt vaincu se remet en guerre les uns contre les autres.

Si le dessin très foisonnant est parfois un peu brouillon et les dialogues dans le standard manga c’est donc bien le déroulé et les rôles assumés par les personnages qui apportent une vraie originalité, faisant de ce titre un succès critique mérité. En espérant que le roi Clevatess (ici étonnamment mis en difficulté!) ne tombe pas dans une mièvrerie incohérente, si l’auteur assume l’esprit sombre qui recouvre le titre depuis le tome un on  est parti pour une sacrée saga fort ambitieuse.

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  • Tsugumi project #5 (Ippatu/Ki-oon) – 2022, 208p., 5 tomes parus, série originale.

tsugumi_project_5_kioonDepuis le dernier tome le rythme et le déroulement de la série ont fortement évolué en densité et en construction d’univers. L’impression d’une bascule dans une sorte de fantasy post-apo se confirme ici puisque nous voyons débarquer notre escouade mal assortie sur l’île où doit se trouver le centre de recherche, objectif de la mission de Léon. Comme au précédent épisode qui nous voyait découvrir la société des singes, nous voilà cette-fois projetés dans un monde d’hommes-oiseaux qui ont un lien très fort avec Tsugumi, l’occasion pour l’auteur de nous raconter sans temps mort la naissance de la jeune créature. On sent ainsi que l’on avance très fortement vers la conclusion de l’intrigue, ce qui n’empêche pas Ippatu de proposer des complications avec un héros très mal en point. Dans ce monde très hostile on n’oublie pas que le Japon radioactif reste une mission suicide, que nous avait fait oublier le ton farceur des relations avec Doudou. L’auteur avance donc étape par étape, avec une structure très carrée faite de rebondissements, d’intrigues politiques approfondies, de designs travaillés et spécifiques à chaque peuple et d’une dualité technologie d’avant/fantasy d’après qui ne cesse de surprendre. Ippatu aime de plus en plus son univers et nous régale de décors incroyables de finesse, si bien que l’on ne sait si les révélations majeures de ce tome indiquent que la fin est proche ou si l’envie de continuer à explorer son worldbuilding va inciter le mangaka à prolonger très loin l’aventure… Du tout bon et peut-être le meilleur volume depuis le début. Vite la suite!

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Lost Lad London #1 – Clevatess #2 – Fool night #3

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Salut les mangavores! On monte en qualité sur ce billet avec trois volumes sortis récemment: une déception sur la pourtant grosse com’ de Ki-oon sur Lost Lad London, un Clevatess confirme la qualité de son ouverture et un Fool Night qui confirme sur ce dernier volume de l’année qu’il est peut-être la série de 2022…

  • Lost Lad London #1 (Shinya/Ki-oon) – 2022 (2019), 224p., volume, 1/3 tomes parus.

bsic journalismMerci aux éditions Ki-oon pour leur confiance.

lost_lad_london_1_ki-oonLe maire de Londres a été assassiné dans le métro. Au mauvais endroit au mauvais moment, Al se retrouve avec le couteau du crime dans la poche et un des plus fins limiers de New Scotland Yard sur le dos. Mais le vieil inspecteur a du flair et ne sent pas de coupable dans ce jeune étudiant. Il décide de faire équipe avec ce qu’il faut bien appeler le principal suspect du meurtre…

Une fois n’est pas coutume, cette nouvelle série courts lancée par les très bons Ki-oon… m’a parue vraiment un ton en dessous de leurs habitudes. En annonçant une approche très européenne du fait du séjour de l’autrice en Angleterre l’éditeur semble justifier un dessin absolument minimaliste qui empêche selon moi de parler véritablement de BD, voir de manga. Le scénario et les personnages sont assez sympathique bien que l’on ne saisisse pas encore tout à fait l’intérêt de cet attelage entre un flic bourru dans le plâtre et un jeune adulte issu d’adoption. On lit donc l’album sans aucun soutien graphique et si l’on ne s’ennuie pas il faut avoir une vraie vibration soit pour les polar, soit pour le graphisme de l’autrice, pour trouver un intérêt de poursuivre sur la série. Pas mauvais mais manquant cruellement de quelque chose de plus, Lost Lad London est une surprise, mais pas dans le sens attendu…

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    • Clevatess #2 (Iwahara/Ki-oon) – 2022 (2020), 224p., 2/5 tomes parus.

bsic journalismMerci aux éditions Ki-oon pour leur confiance.

clevatess_2_ki_oonLe premier tome de cette nouvelle série de Dark-fantasy Ki-oon avait fait l’effet d’un électrochoc! Très curieux de voir ce que pouvait donner ce switch initial qui voit la toute puissance du Démon (dans un esprit qui rappelle Le dernier des dieux) j’avais été surpris à la fois par des dessins aux encrages magnifiques et par une rudesse inhabituelle. On reprend immédiatement après le premier opus qui avait laissé l’héroïne démembrée juste revenue à la vie par le sang maléfique du démon. S’ensuit une première partie de manga très énergique alors qu’Alicia tente d’éliminer les redoutables bandits. Cela nous donnera l’occasion de découvrir la détermination, les talents guerriers de cette championne mal en point mais aussi un artefact très puissant qu’elle devra conquérir en affrontant un démon ancien tapi au fond du lac. Totalement pris par le rythme on bascule ensuite dans des considérations stratégiques moins rythmées et qui, si elles permettent de développer l’univers (avec l’émergence d’un grand méchant très réussi), font un peu retomber la hype de lecture. Alors que le manga en est déjà à son cinquième tome au Japon on patientera en se disant que le passage du second volume est souvent synonyme de ralentissement et qu’avec une telle qualités moyenne basée sur un potentiel très riche on n’est pas du tout inquiet sur l’ambition de l’auteur de bâtir une mythologie et un récit fort en personnages et disruptif.

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  • Fool night #3 (Yasuda/Glénat) – 2022 (2020), 208p., 3/5 tomes parus.

bsic journalismMerci aux éditions Glénat pour leur confiance.

fool_night_3_glenatEn assumant l’orientation Polar de la série, Katsumi Yasuda développe les différentes factions de cette société, entre la police bien décidée à éliminer le sanctiflore assassin, l’Institut de transfloraison lancé dans la récupération de ce spécimen unique grâce à une milice privée ou l’arrivée d’un nouveau venu dans ces militants anti-transfloraison… juste évoqués. Est-ce que l’auteur est en train de construire un projet au grand format en prenant le temps de poser son cadre? Toujours est-il que si le personnage de Yomiko (et le duo un peu gnan-gnan qu’elle formait avec Toshiro) est absent de ce volume pour cause d’hôpital suite à l’agression précédente, ce volume reste plein d’action et surtout de planche absolument à tomber dans son style aussi technique que minimaliste. On savoure chaque ombre et la minutie des détails pour un niveau de précision loin des canons de l’édition manga. La corolaire de cela c’est que la parution s’étire et qu’il faudra attendre le mois de mai pour connaitre la suite des aventures dramatiques de Toshiro. On serait proche du 5 Calvin si ce n’était la très surprenante arrivée du méchant qui sonne vraiment baclée, tellement que l’on revient en arrière pour s’assurer que l’on n’a pas loupé des pages. Vraiment étrange au regard de très grande maitrise générale de Yasuda depuis le début. Erreur de jeunesse sans doute qui n’obère en rien le statut de révélation de l’année manga pour ce Fool Night.

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