
Recueil de 164 pages rassemblant les trois tomes de L’état Morbide (La Maison-Dieu, Le passage avide, Waterloo Exit), écrits et dessinés par Daniel Hulet entre 1997 et 1995. Parution de l’intégrale le 07/07/2021 aux éditions Glénat.


Merci aux éditions Glénat pour leur confiance.
L’amour de la Mort

Charles Haegeman, jeune dessinateur belge au look punk, se rend dans un vieil immeuble à la façade maussade du quartier Sainte-Catherine, à Bruxelles. Accueilli par la non-moins maussade Mme Spiegel, il est immédiatement charmé par la morbidité qui suinte des murs du sinistre appartement, qu’il décide de louer sur le champs.
Charles a en effet choisi de s’isoler dans un lieu qui favorisera sa fascination pour la mort, afin de pouvoir boucler un projet de bande dessinée pour lequel son éditeur le presse. Mme Spiegel, bien qu’acariâtre au premier abord, accepte bien volontiers de louer l’appartement, mais elle prévient néanmoins notre artiste: l’immeuble abrite toute une collection d’individus plus ou moins équilibrés, et le précédent locataire s’est pendu après avoir sombré dans la folie…

Alba, quant à elle, s’inquiète pour son Charles. Le voyant s’enfoncer peu à peu dans la torpeur moite de son appartement aux murs grignotés par la vermine, la jeune femme tente désespérément de le ramener à elle. Mais Alba n’a pas d’argument assez fort pour convaincre Charles de quitter l’appartement. Le jeune dessinateur poursuit ses dessins, mais découvre en parallèle de troublants indices laissant penser que l’immeuble est maudit. Construit près d’un lieu de culte païen, l’immeuble semble animé par des forces obscures, et ce ne sont pas les autres locataires de l’immeuble qui diront le contraire…
Amoureux de la vie, exaltés des chakras, boulimiques de bonnes ondes, passez votre chemin. Dans l’état morbide, vous serez plongés sans concession dans une ambiance glauque à souhait au cœur du climat belge froid et humide. Les couleurs directes désaturées, qui mettent en valeur le dessin réaliste de Hulet, posent un univers pesant, oppressant, que ce soit dans un cadre ouvert ou fermé.

Par des jeux d’esprits subtils et retors, l’auteur nous entraîne en même temps que son personnage dans une spirale de doute et d’angoisse, qui va croissant jusqu’à un final ambigu, voire dingue. En effet, on est presque sur une « fin à la Gainax » (en référence aux studios Gainax à l’origine du final controversé d‘Evangelion), qui remet en cause toute la substance de la trilogie, sans nécessairement verser dans le non-sens toutefois.
A de nombreux égards, on peut trouver des similitudes avec de récents albums comme Nos Corps Alchimiques, voire même des films comme Wounds ou Hérédité (le rituel mystique dont le héros est le sujet involontaire), ou encore Get Out (la métempsycose forcée), ce qui, mine de rien, place L’état morbide au rang prestigieux d’influence !
Cette réédition nous permet donc de découvrir ce classique de la BD Franco Belge, agrémenté d’un dossier complet sur l’auteur en début d’album.