3. Que vais-je lire ensuite ?


Salut à tous et bienvenue pour une nouvelle semaine BD sur le blog,
Avant de commencer je voudrais revenir sur un échange, pas original, mais sur un sujet récurent, que j’ai eu sur Facebook avec des auteurs de BD « installés », qui rebondissaient à une infographie très parlante montrant l’immense écart de chiffres de vente en France entre BD et manga. Comme je le disais ce n’est pas nouveau. Pour rappel, l’ensemble de l’édition française est tirée depuis quelques années exclusivement par la BD (en catégorie large) et ce sous-genre est très fortement tiré par le Manga. Cela a deux effets. Le premier (vision positive) c’est que de l’argent rentre chez les éditeurs qui devraient avoir plus de facilité à publier de nouveaux auteurs inconnus (prendre des risques en somme). Le deuxième (on le voit sur le graphique), c’est que tout le secteur progresse et on ne peut que s’en réjouir, en relativisant la problématique du coût des albums (on est passé à 16€/BD franco-belge, ce qui n’est pas rien). Le corollaire de ça c’est la profusion de titres qui paraissent et rendent difficile de suivre tout ce qu’on voudrait. A titre personnel et pour ce qui concerne les blogueurs, malgré l’aide des Service presse, cela atténue la portée de nos sélections puisque nous ne sommes pas en mesure d’avoir une vue relativement large malgré le temps passé sur cette passion… mais peut-être aussi que cela renforce l’utilité de nos suggestions dans la galaxie des sorties. A vous de me dire…
Pour revenir à nos moutons, les dits auteurs débattaient sur le manga et le côté dérisoire des batailles salariales quand on voit, pour caricaturer, des hordes de jeunes acheter des piles de manga par boulimie quand ils passent à côté de magnifiques BD très qualitatives. Il y a un peu de vrai dans tout ça et aussi du très subjectif, mais ce que j’ai trouvé intéressant c’est la question du pourquoi? Pourquoi en effet les manga se vendent-ils si bien comparé à la BD? Sur le plan graphique on ne peut nier que l’exigence est en moyenne bien moindre qu’en FB, de même que la fabrication de l’objet (papier glacé et couverture cartonnée VS format poche et papier épais). Ce qui me marque personnellement c’est le coût. On me dira que le budget des acheteurs de manga est sans doute aussi élevé que celui des FB, mais le rapport page/prix est sans commune mesure. Qu’on déplore une vision « comptable » ne change rien à ce fait et je me garderais bien de juger les mangavores sur ce point. Chacun met le curseur là où il veut. Ce qui est étonnant c’est que depuis l’âge des magazines de prépublication type (A suivre) qui publiait jadis Corto Maltese, Manara ou Bourgeon à prix modique, je n’ai jamais vu de tentative sérieuse des éditeurs de FB pour proposer des BD à bas prix. Les formats journaux sont de petits coups de com’ et la tendance est plutôt à proposer des formats luxe et grand format. Le public n’est pas le même (plutôt adultes avec salaire pour le FB, plutôt jeunes avec moins d’argent pour le manga) mais en tant que blogueurs (parce que c’est ce que j’essaye de faire à chaque billet) je ne me résout pas à voir des publics cloisonnés. La BD reste de la BD, petit ou grand format, lue de droite à gauche ou avec des superslip. Pourtant je me dis que ce qui définit le manga c’est une lecture rapide, à publication rapprochée de type feuilleton et que certains ont des dessins largement au niveau de la FB. Sans changer le format il serait possible de proposer les nouveautés BD en format souple avec papier moins qualitatif pour des coûts approchant les 5€/album.
Je ne minimise pas l’effet culturel du public manga mais un tel écart ne peux s’expliquer juste par l’amour des kawaï et des jeux vidéo. Il faudrait évidemment avoir les chiffres de vente des séries qui brisent ce mur, comme Radiant en manga ou du Taniguchi chez Casterman pour comparer, mais je conteste une telle spécificité graphique entre manga et BD. My Broken Mariko par exemple aurait très bien pu être publié en francobelge dans une collection type « Angoulême » aux côtés de Vivès ou Bagieu…
Laissons là ces réflexions (que je vous invite à prolonger en commentaires!) pour le récap habituel des lectures. Mon marathon lecture continue avec le dernier et très grosse intégrale d’Injustice… qui perd malheureusement en qualité depuis le départ de Tom Taylor du scénario, en retombant dans un schéma classique de Justice League. Le dernier album de la saga White Knight de Sean Murphy sur Harley Quinn est en revanche au même niveau que ses prédécesseurs et clairement un coup de cœur de cette fin d’année! Après Contrapaso, impressionnante enquête dans l’Espagne franquiste (et candidat à l’album BD de l’année pour moi) j’ai découvert avec surprise une courte série dont j’avais entendu du bien et qu’on m’a prêté, La Cour des miracles. Si le dessin est un peu spécial au début on finit par s’y faire et apprécier une noirceur qui mets en regard le roi Lois XIV et le roi des Gueux, le Grand Coëstre qui régnait sur la sous-société de l’Ancien Régime. Un subtile parallèle avec notre époque et le rejet du pouvoir officiel est très intelligemment suggéré en renforçant la portée politique du projet. Le scénariste avait proposé le magnifique Chevalier à la Licorne, une des premières chroniques de ce blog. je vais très probablement prendre le temps d’un billet sur cette Cour des miracles pour détailler tout cela.
Les nouveau Lanfeust et Tueur sont tout à fait honnêtes, sans pour autant lever un enthousiasme fou (billet groupé en fin de semaine). La grosse sortie Dupuis de ce mois c’est le Tenebreuse de Mallié et Hubert, à titre posthume. Sympathique mais terriblement classique, il faudra attendre le second tome pour se prononcer. Autre posthume avec un polar de Taniguchi qui m’intrigue et que je viens de commencer, avant d’entamer une des BD qui me tente le plus de cet automne depuis le choc qu’a été Rio de Corentin Rouge. Si vous ne connaissez pas ce dessinateur précipitez vous sur la série des favelas (cinq tomes dont l’intégrale vient de sortir chez Glénat). Enfin il faut que je reprenne le premuer Undiscovered country avant la sortie incessante du second de cette dystopie américaine très d’actualité…