
Treizième tome de 52 pages de la série écrite par Christophe Bec et dessinée par Ennio Bufi. Parution chez les Humanos le 03/11/2021.


Merci aux Humanos pour leur fidélité.
We’re gonna need a bigger world
Après s’être accordé le temps nécessaire à un flashback (tomes 11 et 12), Carthago revient à ses moutons, ou plutôt à ses requins-géants-dévoreurs-de-moutons. Dans le tome 10, nous assistions à un contact historique entre l’Humanité et une race surnommée les Tritons Antiques, espèce intelligente qui a colonisé le plancher océanique.
Recyclant le ressort dramatique d’une autre de ses séries SF, Christophe Bec avait placé sur l’univers de Carthago un compte à rebours mortel, sous la forme d’une explosion nucléaire sous-marine, à même de provoquer la fin du monde. Grâce à la coopération entre les humains et les tritons, l’apocalypse sismo-nucléaire était évitée de peu. Lou Melville, protagoniste de ce nouveau cycle de la série, découvrait ainsi ses origines et embrassait son héritage en restant avec les tritons pour veiller sur les Mégalodons.

Le tome 13 opère une certaine ellipse et nous emmène dans un monde ravagé par des explosions nucléaires, ce qui rend caducs les exploits du tome 10. Lou, craignant pour le bien-être des Mégalodons prisonniers, plaide leur cause auprès des tritons, qui acceptent de les relâcher dans la nature, en donnant pour consigne à Lou, qui peut communiquer télépathiquement avec eux, de ne pas les approcher de la surface de l’océan.
Les choses ne se passent évidemment pas comme prévu et Lou se retrouve échouée à la surface. Recueillie in extremis, elle se réveille sur une plateforme pétrolière désaffectée, occupée aujourd’hui par des moines qui en ont fait un monastère flottant afin de fuir les pillards qui écument le continent. Remise de sa convalescence, Lou s’acclimate et reprend des forces, mais ne peut s’empêcher de s’interroger sur ce lieu singulier, où règne une ambiance pesante, sans parler des allées et venues nocturnes de certains moines.
Les blues des abysses
Certaines tendances ont la vie dure, ce tome de 13 de Carthago ne fait pas exception. Encore une fois, Christophe Bec, se reposant sur un concept attractif, délaye son propos en faisant en deux tomes ce qui aurait pu tenir en un seul. Certes, il tisse des intrigues secondaires (le sous-marin, le retour du Centenaire des Carpates) qui porteront leurs fruits plus tard, mais l’action présente s’en trouve amoindrie, et peut malheureusement se résumer en quelques mots (Lou échoue sur une plateforme occupée par des moines dont certains se sont mis à vénérer les Mégalodons), ce qui donne la sensation de beaucoup d’images pour au final peu d’action.
Si l’on considère ce diptyque du Bagarreur comme une histoire en soi, auto contenue, alors ses trois actes seraient répartis entre les deux tomes. Or, ce premier tome fait office au mieux de premier acte, ce qui risque de déboucher sur un déséquilibre, qui aurait pu être évité en condensant et le scénario et le découpage, dont on ne saurait dire s’il est cinématique ou dilatoire.
Graphiquement, la qualité est toujours présente grâce à Ennio Bufi, qui s’est désormais imposé comme identité graphique de la série. De plus, il nous gratifie d’une sublime couverture, à mi-chemin entre King Kong et l’Appel de Cthullu.
Carthago se relance donc sur de nouveaux rails mais risque de perdre des lecteurs en cours de route, la faute à un scénario dilué et un rythme morne.

